Carnet de voyage

Encyclopédaliste

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Dernière étape postée il y a 1253 jours
Par Abrac
Je développe un mode de vie nomade basé sur moins d'argent et plus de collaboration informelle.
Mars 2021
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Publié le 19 mars 2021

Je m'appelle Charles, j'ai 27 ans. C'est ma maman qui m'a appris à faire du vélo vers 6 ans. Je la revois courir à côté de moi sur la rue en face de la maison. J'ai pas gardé longtemps les roulettes, un vrai cycliste déjà. C'est resté mon mode de transport principal. Avant de commencer ce voyage j'allais au boulot sur Paris depuis la banlieue en multimodale: vélo-train. J'étais développeur dans une genre de start-up qui développe des outils de visualisation de données pour le transport urbain: les bus, les trains, les bateaux aussi parfois. Ce boulot je l'ai quitté pour partir voyager sur une durée indéterminée vers des destinations indéterminées. Pourquoi ?

Et bien je fais depuis au moins le lycée le constat que ce monde est assez absurde. On brule des milliers de kilo-mètres carrés de forêt tropicale tous les ans pour produire de la viande de boeuf bas de gamme consommée par des travailleurs épuisés par leurs journées de 9 heures à réaliser des taches qui les emmerdent dans des plats tout préparés emballés sous plastiques. Aujourd'hui on découvre des écosystèmes encore inexplorés, au fond des océans, composés de formes de vie qu'on ne connait pas mais qu'on a déjà contaminé au plastique. Ça fait au moins 20 ans que le GIEC alerte des conséquences des énergies fossiles sur le climat, quand j'avais 8 ans on m'en parlait déjà. Aujourd'hui on profite de la fonte des glaces pour aller chercher du pétrole jusqu'en arctique. Il semble que le système soit programmé pour aller jusqu'au bout de sa logique. Et tous ça pour quoi ? Pour alimenter une machine économique qui permet à 1% de la population de spoiler presque 50% de la richesse mondiale.

Passer la colère je reste quand même assez sidéré par la capacité étonnante de l'être humain à persister dans des comportements qu'il sait absurde.

Ce monde me pose au moins trois problèmes qui se recouvrent partiellement. Déjà évidement je suis anxieux par rapport au futur. Parce que c'est clair que ça va pas continuer comme ça encore très longtemps, on est en train de butter sur des limites physiques, on en voie déjà les conséquences: les méga-feux en Californie ou en Australie, la pandémie bien sûr, les pénuries de ressources... Si on était des êtres rationnels on serait en train de se préparer à organiser notre résilience face à tous ça. Moi je pense qu'elle s'organise à l'échelle locale la résilience, à quelques dizaines ou centaine de milliers de personnes. Aujourd'hui c'est 2% de la population active qui travaille dans l'agriculture et ça continue de baisser tous les jours. Ceci n'est possible que parce qu'on a du pétrole pour faire tourner des machines qui remplacent les hommes.

Ce qui m'amène à mon deuxième problème qui est le sens de ma vie dans tous ça. Moi je suis ingénieur. Ma raison d'être professionnel c'est d'être un rouage de la machine économique. A une époque je me racontais à moi même que j'allais avoir des postes à responsabilités et avoir pleins de leviers pour faire des trucs. Quel trucs je savais pas trop. Evidement c'est complètement bidon, comme est complètement bidon la conception de la transition écologique ou il n'est question presque uniquement de panneaux solaires sur les toits, de nucléaire, d'éoliennes en mer, de voitures électriques ou même carrément d'avions à hydrogène. Moi j'appelle ça la théorie du verdissement, on s'imagine opérer des transitions localement sur tel ou tel source d'énergie, tel moyen de transport en conservant le système globalement identique à l'échelle macro. C'est pas seulement bidon, c'est peut-être le mensonge le plus pernicieux de notre époque. J'en ai connu des ingés qui voulaient faire des trucs et qui me disaient sur un ton enthousiaste être super content de contribuer à foutre des panneaux solaires sur le toits des centres commerciaux. Moi ça m'intéresse pas, je pense que c'est pas là qu'est l'enjeu.

Mon dernier problème c'est que cette époque n'invite pas franchement à l'optimisme anthropologique. L'humanité est en train de commettre la 6em extinction de masse de l'histoire de la terre en toute connaissance de cause et dans l'indifférence générale. L'être humain est quand même un créature à certains égards assez effrayante.

C'est parce que j'avais tous ça en tête qu'en aout 2020 je pars en Dordogne faire 10 jours de wwoofing sur une ferme auto-gérée: le Bandiat. Il y a énormément de passage sur cette ferme. On va pas se mentir c'était un peu le bazard là-bas. Mais j'y ai rencontré des voyageurs d'un genre que je ne connaissais pas à l'époque. Des gens qui voyagent presque sans argent en stop et sac à dos, un voyageur à vélo, des couples avec leur vanne aménagé, un maraîcher bio venu aider quelques semaines. J'ai réalisé que ne pas avoir de boulot et réduire drastiquement ses besoins, notamment ne pas avoir à payer un loyer tous les mois, est un choix de vie que certains embrassent pendant des années. En faisant ça on visite des lieux qui progressent vers d'autonomie alimentaire et énergétique, on développe un mode de vie recentré sur l'essentiel, peut-être moins confortable mais avec plus de temps pour cuisiner ou faire de la musique. Moi ça m'a parlé. Ça a même été un vrai soulagement de réaliser que ça existait.


le tronchay, Le Tronchay, 28190 Courville-sur-Eure, France

du 15 mars au 18 mars

Lundi 15 mars, je quitte la maison de ma grand mère à Mareil Marly que je connais depuis que je suis petit. Je me suis lancé dans cette première étape vers la ferme du Tronchay le coeur assez lourd car cette maison est en vente et que je n'y retournerai probablement jamais. Mais ceci offre aussi une dimension symbolique intéressante au voyage, il est un passage vers l'âge adulte.

J'ai fait 87km de vélo et un coup de RER entre Versailles et Rambouillet pour arriver à la ferme du Tronchay près de Chartres. Je suis arrivé bien fatigué et affamé. J'ai été bien accueilli par Pascal.

Pascal il est le maire de sa commune.

La ferme du Tronchay est une ferme qui produit surtout de la pomme à cidre et qui sert aussi d'espace de coworking et de chambre d'hôte. Pascal a lancé le projet il y a moins d'un an. Ils sont en train de rénover la serre et de tailler les pommiers.

la Ferme du Tronchay 
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Publié le 19 mars 2021


34 Rue de Vernouillet, 41160 Saint-Jean-Froidmentel, France

18 au 21 mars

18 mars 2021, 150 ans jour pour jour après les débuts insurrectionnels de la Commune de Paris, je quitte le Tronchay pour aller au Moulin Bleu près de Châteaudun. A ma grande surprise j'ai parcourus 65 km d'une traite dans la matinée. Je ne m'attendais pas à arriver pour le dej en étant partis à la cool vers 9h30.

Le Moulin Bleu organisait des portes ouvertes sur ce weekend, j'avais calibré mon calendrier pour pouvoir y arriver et repartir dans les temps. Le moulin bleu est un collectif d'habitants qui ont racheté un ancien moulin le long du Loir dans le Loir-et-Cher, près de Chateaudun. Le moulin a d'abord servis à faire de la farine et a été reconvertis pour produire de l'électricité jusque dans les années 80. Aujourd'hui la turbine est en délabrement. La rénovation de la turbine fait partis des gros projets du collectif, bon courage à eux.

Le moulin à proprement parlé, c'est assez énorme

Comme elles tombent bien


De ce trajet si court de la branche à la terre

Comme elles savent mettre une beauté dernière

Et malgré leur terreur de pourrir au sol

veulent que leur chute ait la grâce d'un vol


Edmond Rostand

pièces de vie du moulin 
le jardin, ils ont ~12 ha, ils sont surtout en train de développer la forêt comestible

C'était un weekend bien sympa, on a planté des arbres, fait du pain, de la musique, collecter du bois, on a bien fait la fête samedi, la veille d'une grosse étape jusque dans le Cher.

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Publié le 24 mars 2021

Quand j'ai parlé de ce projet d'étape de Châteaudun dans le Loir-et-Cher jusqu'à Vierzon dans le Cher, la traversé de toute la Bauce et de toute la Sologne, c'est à dire 140 km, à Lola elle s'est gentiment moqué de moi. "ahlala, Il a pas d'expérience du voyage à vélo ce Charles, il ne se rend pas compte". Du coup moi la veille je fait la fête avec les autres, je pars à la cool vers 11h, je me paie même le luxe de faire un détour par le château de Chambord, de toute façon cette étape est interminable, quand je serai complètement cuit je planterai ma tante et je finirai à la cool le lendemain, pas de pression.

 Chambord qu'on ne présente plus

Vignoux-sur-Barangeon

Du le 21 mars au 28 mars

Finalement je l'ai fait, une belle étape de 150 km d'une traite, j'étais assez fière de moi quand même. Mais reconnaissons que j'ai eu des très bonnes conditions. Déjà c'est tout plat et en plus j'ai eu un vent favorable tout le long du parcours. Je suis arrivé vers 19h40 à la Casa del Sol ou j'ai été accueilli par Jean Claude et Maris Jo. C'est un couple de semi-retraités (selon leurs termes) qui font du jardinage et ont des chevaux et des ânes. Ils habitent une vraie maison de hobbit très mignonne.

la Casa del Sol 

J'ai surtout accompagné Jean Claude dans ses activités. C'était très enrichissant de passer du temps avec cet ancien conseillé municipale très engagé pour la préservation de la nature et de la culture paysanne et populaire. C'est un ancien ouvrier des télecom qui a développé une culture sur l'histoire de sa région et du monde, sur les oiseaux et la biodiversité sauvage qui m'a fait plusieurs fois sentir l'étendu de mon ignorance. J'ai cueilli de l'ail des ours avec Marie Jo dans la forêt près de chez eux, je ne connaissais pas, c'est très bon. Marie Jo cuisine des trucs super, j'ai été traité chez eux comme chez mes grands parents.

quelques images de la région

L’ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit.


Aristote (et non pas Confucius)

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Publié le 30 mars 2021

Vierzon - Montluçon

le 28 mars

Une belle ballade de 130km sur le canal du Berry avec un passage par la cathédral de Bourges. C'est un canal qui a été creusé au 19em siècle le long du Cher pour permettre l'acheminement du charbon et des métaux issus des mines et des usines sidérurgique. J'ai eu le vent de face tout le long et il a fait soleil.

J'ai été hébergé à Domérat par Jean Philipe que j'ai rencontré par couchsurfing. C'est un prof de musique qui hégerge des migrants et fait pousser ses légumes. Il m'a fait une soupe d'ortie très bonne, ça faisait longtemps que j'en avais pas mangées. Il m'a aussi conseillé une route de vélo très sympa qui monte tous doucement jusqu'à Néris les Bains pour l'étape suivante, c'était parfait.

une belle étape 
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Publié le 1er avril 2021

Menat, Puy de Dôme

29 mars au 2 avril

Lundi 29 mars je pars donc par Montluçon pour rejoindre la route de vélo que m'a indiqué Jean-Philippe. Je suis arrivé à Menat au bout de 55km, en passant par Neris les Bains et près de Comentry, soit l'étape la plus courte, à la fois en terme de distance et de durée pour le moment. ça a pas été facile pour autant à cause des 500m de dénivelé et du soleil, je suis arrivé complètement rouge et avec des bonnes douleur dans les chevilles. J'ai baissé ma celle pour les douleurs dans les chevilles, j'espère que ça va aller.


La région est vraiment vraiment magnifique, c'est la plus belle campagne que j'ai vu du voyage pour le moment. Le paysage est en train de devenir progressivement montagneux. J'adore la montagne.

Une  ballade dans le Puy de Dôme

A Menat je suis hébergé par Vincent. On s'est connu grâce à Antoine. Antoine a écris une thèse d'économie de la décroissance et quand j'étais à Mycélium j'ai réalisé un podcast interview de lui avec un autre membre pour parler de la crise de la covid, du plan de relance du gouvernement et plus généralement d'économie de la décroissance. Vous pouvez réécouter le podcast ici.

Quand on préparait l'interview il m'a dit qu'il était sur un éco-lieu. Je lui ai demandé où c'était et si on pouvait venir visiter et aider au jardin. C'est comme ça que j'ai connu Vincent et qu'il m'a invité. J'ai surtout bosser avec Barbara au jardin. On a désherbé, paillé des planches de culture et repiquer des laitues. On était plutôt à la cool, on a fait un peu de musique dans la salle de jam.

Colloque deVendoges, salle de jam et jardin

J'ai aussi rencontré Axel, un voyageur en sac à dos qui revient de la Drôme ou il participait à un chantier collaboratif sur un éco-lieu d'assez grande envergure, Solaia. A Solaia ils ont une activité de jardinage d'autonomie alimentaire et il veulent commencer à faire vraiment du maraîchage en perma cette année. Jeudi Axel m'a donné le contact de Brigitte qui s'occupe du jardin de Solaia. Il recherche justement un volontaire pour venir aider ! J'ai 381km de route et 6300m de dénivelée positive pour aller de Menat à Menglon. Je dois y être dans 4 jours pour remplacer quelqu'un.

Tableau de bord synthétique du trajet Menat - Menglon

Mon ami Arthur a reçu du matériel de vélo pour sa soutenance de thèse. Il est originaire du Puy de Dôme et il prévois de voyager entre Clermont-Ferrand et Super Lioran avec un ancien camarade de prépa BCPST. Samedi on peut faire une étape ensemble de Gannat à Clermont Ferrand. Comme ça samedi je vais avec eux jusqu'à Clermont-Ferrand, je dors chez les parents d'Arthur à Clermont, je prends le trains dimanche de Clermond Ferrand à Valence et je finis dans la journée à vélo jusqu'à Menglont. ça ferais 540m de dénivelée sur 80km, ça risque d'être dur mais au pire je plante ma tante et je finis le lendemain. En plus Brigitte a dit qu'elle pouvait passer me prendre si je suis en galère et pas trop loin de Menglont.

"En dernier recours, je préfère la violence à la lâcheté"

Gandhi

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Publié le 6 avril 2021

Menglon, Drôme

Depuis le 4 avril, en principe pour tout le confinement

Samedi matin je quitte Vendôges pour retrouver Arthur et Charles Edouard à Ebreuil sur le pont. On a fait un parcours vtt assez sympa issue de la Grande Traversé du Massif Central jusqu'à Clermont-Ferrand. On a vu un serpent. J'avais des doutes mais j'ai réussi à les suivre malgré mon chargement et mon vélo de rando. Le soir j'étais hébergé chez la mère d'Arthur, Caroline, à Clermont-Ferrand. j'ai aussi rencontré sa soeur Salomé.

parcours vtt de Ebreuil à Clermont avec Arthur et Charles-Edouard

Dimanche matin je prends le train à Clermont-Ferrand à 8h58 pour Valence avec un changement à Lyon par Dieu. J'ai enchainé sur mon étape la plus pourrie jusque là, 80km, 430m de dénivelée le long d'une départementale beaucoup plus empruntée que je ne pensais jusqu'à Menglon. C'est à 15km de Die. Je suis arrivé à 18h45, juste à temps pour le couvre feu.

Le terrain de Solaia appartient à Benjamin et à Line. Ils possèdent une marque de produits alimentaires vegans. Ils ont leur atelier de transformation et d'expérimentation dessus, au milieu des montagnes. Je partage une roulotte avec Mike, un suisse de 37 ans qui voyage avec sa voiture. On est pas très très nombreux en woofing en ce moment. Gérôme et Julie, un couple de trentenaire micro-entrepreneurs et leur fils Gabin, Cécile, une psychomotricienne de 29 ans en reconversion dans le maraîchage, Daphney et Olivier et un autre Benjamin qui sont arrivés hier. Je prévoie de passer le confinement ici.

gauche: lieu de vie de Solaia (cuisine, douche, salon, atelier/labo de transfo). droite: l'intérieur de la petite serre "Cosmos" 
le terrain de Solaia, je suis hébergé dans une roulotte comme ça, celle du milieu

Je travaille surtout au jardin avec Brigitte, la responsable du jardin d'environ 50-60 ans, et avec Cécile qui est arrivée en novembre et repartira en aout. Hier on est allé en vélo sur un chantier participatif avec Cécile et Gérôme. On a vu une orde de vautours sur la route en train de charogner un bouc mort. C'était une scène assez dépaysante dans un décore aride qui ressemble un peu à une savane. On a vu un barrage de castor sur la route aussi.

chantier participatif, du muscardin c'est 30min en vélo depuis le terrain de Solaia

Sur le chantier j'ai rencontré Etienne. Il voyage parfois avec un brompton, un vélo pliable. Il était en train de rénover un Solex des année 50 quand on s'est rencontré. Il s'intéresse beaucoup à la question de la mobilité et il prévoie d'organiser un convoi participatif de vélo pour récupérer 1,7 tonnes de bois depuis Valence. Je lui ai dit que le projet m'intéressait.

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Publié le 12 avril 2021

Menglon, Drôme

On est lundi 12 avril, ma deuxième semaine à Solaia commence tranquillou. On a bossé au jardin samedi donc on a que deux heures à faire sur le décorticage de l'ail noir, il fait froid ce matin, il a plu toute la nuit, je suis bien content de pas bosser au jardin, on voit que beaucoup de neige c'est déposée à la surface des montagnes.

Ces nuages cotonneux donnent une très belle lumière sur la montagne 

L'ail noir est un des produits transformés que la boite de Benjamin commercialise et les woofeurs participent à certaines étapes de transfo, c'est de l'ail qui a cuit à faible température pendant 3 semaines, ça lui donne un gout vinaigré et sucré comme du vinaigre balsamique, une texture très tendre et une couleur toute noire. Ils le commercialisent en caviar ou entier. Ils font aussi des barres de protéine vegan pour le sport, sans gluten, sans pesticide, sans lactose, sans OGM, sans soja, sans huile de palme.

ail noir et un autre produit de la game ISWARI, la marque de Benjamin

je dors et je mange super bien ici ! Je bosse au jardin dans le froid du matin et l'aprem en général c'est vélo et/ou rando. Je peux vous dire qu'après ça je laisse pas mon assiette au chien. Je suis hébergé en dur dans une roulote que je partage avec Mike. La roulotte est divisée en deux chambres, on a vraiment notre intimité mais on est aussi loin de la douche, de la cuisine et du salon communs.

J'ai fait des très belles rando dans le coin. D'abord j'ai fait le Col de Pennes en solo en vélo/rando, une longue monté monotone de 40min en lacés et pente douce goudronnée sans croiser aucune voiture puis 20min de marche dans de la buissaille caillouteuse pour atteindre vraiment la crête et avoir une vue dégagée sur les deux vallées. Je suis arrivé en haut en milieu d'aprem avec un ciel sans nuage, la lumière était pas très jolie, les hombres étaient très dures. Merci à Laure que j'ai croisé par hasard au niveau du pont en travaux pour m'avoir donné la route et au responsable des travaux pour sa coopération passive lors de la traversée.

Col de PENNES, Alt. 1040 m
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Publié le 12 avril 2021

Samedi dernier, le 10 avril, on a fait la Montagne de Piemard avec Olivier et Daphné, une belle boucle de 3h autour de Châtillon en Diois, 515 m de dénivelé positive sur 5,38km, niveau difficile. On est parti tranquillou vers 16h00 de Châtillon-en-Diois avec nos frontales "au cas où". C'était génial, j'avais jamais vraiment fait de la rando avant, c'était un petit voyage dans le voyage. On a traversé des biotopes assez variés, des sous-bois assez denses ou on entend les oiseaux, la crête très rocheuse et sèche, une forêt de pins très aérée sur l'autre versant. Le ciel était bien gris, la lumière était très belle, les ombres étaient douces.

Montagne de Piemard, samedi 10 avril à côté de Chatillon-en-Diois

Hier, dimanche 11 on a visité le très spectaculaire Cirque d'Archiane avec Olivier, Daphné, Julie et Jérôme avec un passage par un ruisseau caché dans les sous-bois, un parcours un peu plus tranquille que la veille, en pleine nature. Jérôme et Julie l'avaient déjà fait avec leur fils de 5 ans, une belle sortie pour son âge. Un cirque c'est un terme géologique qui qualifie une falaise circulaire tracée par un glacier ou un volcan, je ne connaissais pas, la géologie c'était pas mon truc. Les vautours habitent les falaises du cirque, en avril c'est la période de couvaison mais on peut quand même les observer sortir des cavités de la falaise.

Julie et Jérôme
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Publié le 15 avril 2021

On est jeudi 15 avril, hier je suis allé en vélo aux Sucettes de Borne sur le col de Glandasse. C'est un site géologique assez unique constitué de fines feuilles de roche de 100 m de haut. Le site est apprécié pour la pratique de l'escalade même si la roche est très friable.

Sucettes de Borne 
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Publié le 25 avril 2021

On est dimanche 25 avril, les jours rallongent, le temps s'adoucie et c'est une semaine bien festive qui se termine à Solaia, soirée chez Philippe mardi, bord de Drôme pour célébré le départ de Julie et jérome jeudi soir et apéro au Muscardin samedi.

soirée en bord de Drôme jeudi pour sélébrer le départ de Julie et Jérôme de Solaia

Samedi on a fait une belle rando aux buttes de Nève avec Olivier, Bruno, Blandine et Ben. On a rencontré un groupe bien sympa en haut, Emma, Julie et Quentin tous en reconversion pour devenir cordonniers.

Buttes de Nève avec Olivier, Blandine, Bruno et Ben 
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Publié le 19 mai 2021

On est le 11 mai et depuis 2 semaines Solaia est un vrai cluster à SARS-CoV 2 (variant anglais, cheer). Antoine et Camille ont passé une semaine à dormir, manger de la soupe et boire des infusions de tin. J'étais le seul à avoir obtenu un test négatif. Et bah voila c'est pas si compliqué les gestes barrière je me disais. ahah

Bon je suis arrivé à Solaia le 6 avril, ça fait donc largement 1 mois que je suis ici, il était temps de commencer à reprendre la route. J'ai trouvé une annonce plutôt très intéressante sur le groupe d'entraide maraichère sur les réseaux. Il s'agit d'un chantier participatif de piscine naturelle de 2 semaines dans la Drôme. Leur vidéo de présentation donne plutôt envie d'aller voir. J'ai contacté Nans, je suis le bienvenue ! C'est parfait, je peux aller là-bas en une étape, ça termine le 23 mai, quelques jours avant le début du projet de convoi de vélos de Etienne pour aller chercher 1.5T de bois près de Valence, on va en reparler. Un programme bien goupillié, ça va être de la frappe, je vais rencontrer des gens qui viennent de l'étranger en Workaway.

vidéo de présentation de la Maison Verte 

Sauf que non, ce midi j'ai le résultat de mon PCR, je suis contaminé à la Covid, là c'est l'isolement pendant 10 jours. Je vais rester dans ma caravane à Solaia. Quelle déception. Désolé Nans, j'espère pouvoir venir pour la fin du chantier déjà bien réorganisé à cause de la pluie.

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Piegros la Clastre

du 19 au 23 mai

Mercredi 19 mai mon isolement prend fin, à 16h je quitte Solaia pour pédaler vers Piegros la Clastre, un joli petit village vers Crest en haut duquel il y a la Maison Verte, la collocation de Nans, Tara et Jules. J'y arrive à 19h10, dommage, à 10 min près j'évitais la douche. Je suis arrivé un peu grognon donc et il m'a fallu au moins 10 min avant de réaliser à quel point le paysage dans lequel est construit la maison est magnifique.

Quand j'arrive les travaux de la piscine ont déjà bien avancés 

La journée commence pour certains à 7h15 par le cours de yoga de Géraldine, je l'ai fait une fois, dej à la cool de 8 à 9, point météo intérieur vers 9h, chacun est invité à partager son état émotionnel dans un grand cercle de parole, vers 9h40 on attaque le chantier jusque vers 12h30, à 12h30 on déjeune ce qu'a préparer l'équipe dont c'était le rôle la matinée, on reprend à 14h, pause gouté vers 17h, fin de la journée de travail vers 18h. On a bien bossé, le chantier devait être bouclé le 23 mai et il a été bouclé le 23.

 le chantier participatif à proprement dit
"merci l'équipe cuisine !" 

Mais qu'on se le dise, ce chantier pour moi c'était juste un prétexte pour vivre un projet collectif, rencontrer des gens incroyables et faire de la musique. Il y avait une telle concentration d'artistes, de musiciens, de danseurs, de slameurs, même un jongleurs de feu que les temps hors du chantier étaient saturés d'instants de grâce, la musique était totalement omniprésente. La fête de fin de chantier était une scène ouverte permanente lors de laquelle plus d'un dizaine de personnes sont venus exposer leurs talents.

fête de fin de chantier 

J'ai beaucoup vécu en 4 jours, je repars d'ici avec la certitude d'aller dans une direction qu'y a du sens. J'ai beaucoup de gratitude.

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Publié le 3 juin 2021

Luc en Diois

du 23 au 29 mai

Le dimanche 23 mai le chantier de la piscine de la Maison Verte prend fin, je préfère repartir le soir même pour un autre chantier, l'Escargot du Muscardin, plutôt que de passer la nuit sur place et repartir le lendemain. J'avais besoin de me retrouver quelques heures seul sur mon vélo, regarder les montagnes et faire le vide. J'ai retrouvé mon amie Pauline que j'avais connu à Solaia sur la route à Pont de Quart 1h et je suis arrivé vers 23h à Luc, juste à temps pour trouver les participants du chantier autour du feu et une assiette de pattes et de salade.

le collectif qui travaille sur Chantier de l'Escargot 

Le Muscardin c'est un éco-cartier qui se construit à Luc en Diois, juste à coté de Solaia. Il y a 8 propriétaires avec chacun leur propre terrain qui construisent eux-même leur maison avec des matériaux locaux, avec du bois et de la terre notamment. L'Escargot c'est l'une de ces propriétés, elle appartient à Sophie. Au Muscardin il n'y a pas de barrière entre les terrains et les gens se connaissent et s'entraident de façon informelle.

 le Muscardin avec la salle de spectacle construite par la famille de circassiens au fond
 la Maison Escargot du Muscardin avec les espaces partagés et les chambres aménagés avec des caravanes

J'avais connu en accompagnant Jérome et Cécile, j'en avais déjà parlé dans ce carnet en fait. J'avais aussi déjà raconté ma rencontre avec Etienne qui m'avait parlé de son projet fou d'aller chercher 2 tonnes de bois au nord de Valence avec une équipe de ~30 cyclistes. Etienne veut utiliser ce bois pour faire la parquet de la maison, c'est du bois de cerisier. Etienne, je ne le savais pas, est celui qui supervise les travaux, c'est un vieil ami de Sophie. Et bien ce projet fou au Muscardin on a décidé de le réaliser et c'est pour ça que je m'y installe une semaine avant le début du convoi, le 29 mai. Pendant une semaine j'ai surtout fait de la révision sur des vélos et sur les remorques, réviser les roulements, les raillons, les chambres à air, j'ai usiné quelques pièces à la disqueuse et à la perceuse à métaux, j'ai aussi creusé et terrassé de la terre pour le chantier lui même et pour le jardin. Il y a des gens compétants qui savent faire mais il n'y a pas de chef, pas d'ordre, même pas d'injonction à travailler. J'ai adoré cette ambiance de travail très autogérée qui tranche fortement avec Solaia. A l'Escargot on travaille de façon anarchiste au sens noble du terme.

on s'amuse mais on bosse au Muscardin ! 

Le 29 mai le projet avec lequel nous partons est le suivant. premier jour, Le plus gros de l'équipe de cyclistes part de Luc sans tirer de remorque et avec son matos de bivouac jusqu'à Tournon en Ardèche pour y passer la nuit. C'est 100 km en descente. On est rejoint sur la route par d'autres cyclistes. Les remorques sont transportées par un Goupil, un mini-camion électrique. Deuxième jour, on prend le train à vapeur de Tournon à Lamastre dans la matinée, on charge les remorques en début d'aprem à la scierie et on pédale 60 km jusqu'au Château Pergaud de 14h à 19-20h où on est accueilli par le collectif d'habitants que connait Etienne. Troisième et dernier jour, on finit de Château Pergaud à Luc avec les planches de bois. Mais ça ne va pas se passer comme ça.

 dernière préparations à gauche, le fidèle Goupil à Droite
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Tournon en Ardèche

29 mai

Le 29 je me réveille avec Clément qui m'hébergeait alors dans son campingcar à 6h, on prend le petit dej à la cool, on prépare les derniers vélos, on charge les sacoches, Clément range le campingcar qui va servir de voiture ballé avec le Goupil et de ravitaillement en bouf. A 8 heure on est parti pour une étape tout en descente de 100 km avec les remorque chargée dans le Goupil. On est ~20 dont 2 enfants, Numa le fils d'Etienne et Arjun le fils de Sophie.

le tout premier kilomètre du convoi allé entre Luc et Recoubeau
Pontaix,~30 km, Etienne sur son Brompton suivi par le Goupil

On a eu un temps idéale, pas trop chaud, pas de pluie. On est passé par quelques coins sympas, Pontaix, Crest, le parc de Valence, le village médiévale de Tournon. Les paysages se transforment rapidement. En quelques dizaines de kilomètres on quitte presque complètement la montagne de la Drôme pour l'Ardèche.

dernière partie d'étape vers Valence, à gauche Etienne  et Numa devant des ruines, à droite Louis en bord de Rhône

On arrive au campement un peu avant la tombé de la nuit. Vers 21h je décharge mes affaires, je saute dans de le Doux, je plante la tante, je partage le repas avec les autres et à 22h30 dodo. On a mis quelques heures de plus que prévus mais on est arrivé là on voulait arriver.

arrivé au campement vers 21h 
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Lamastre en Ardèche

30 mai

Dimanche 30 mai on repli le matos, on recharge les vélo et vers 9h on est parti pour la gare de Tournon pour prendre le Mastrou, un train vapeur historique de la région qui va nous amener jusqu'à Lamastre ou se trouve la scierie. Une belle ballade en bord de Doux.

le Mastrou de Tournon à Lamastre 

Jusque là tout se passe comme prévu, on est arrivé juste à l'heure pour prendre le train, vers 12h on est à la scierie. C'est une fois à la scierie, quand il faudra mettre en place notre système d'attache artisanal de remorque construite avec du bois de récup et des roues de vélos pour enfants sur une trentaine de vélos qu'on va accumuler plus de 4h de retard sur l'emploi du temps.

 montage des remorques à la scierie

On avait prévu de repartir vers 14h pour finir la journée à 70 km de là, à Château Pergaud. Mais on quittera la scierie que vers 19h et on campera à ~1km de la scierie. L'objectif maintenant c'est de prendre toute la journée du lendemain pour aller jusqu'à Château Pergaud.

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Allex, Drôme

31 mai et 1er juin

Lundi 1er juin on décolle à 8h30 sans prendre de tidej. On a été presque uniquement sur de la piste cyclable dans les collines ardéchoises. On a été sur de la route avec des bagnoles seulement dans les tout derniers kilomètres. C'est à dire qu'on a passé toute la matinée sur du chemin graveleux et caillouteux ce qui a provoqué énormément de casse sur les systèmes d'attache et sur les remorques elles-même. On a dû assurer la maintenance de tous les systèmes en allant chercher des pièces, chercher des outils à l'avant, à l'arrière du convoi, dans le Goupil, gérer les arrêts avec les différents pelotons.

une étape sympa et épuisante 
dej sous un arbre 

On est arrivé à Château Pergaud vers 21h, soit ~70 km en ~13h en comptant les pauses, la maintenance des systèmes et l'intervention de la police (on c'était baigné tout nu dans une rivière, une dame pouvait nous voir depuis sa fenêtre et a appelé les flics. Les remorques étaient bien stationnées sur un parking de camions). "A ce rythme là on sera jamais à Luc en 1 seule autre journée de vélo", dit-on.

repas au château 

Je plante la tante en arrivant, je prends une douche avant tout le monde, on mange ce que les châtelains avaient préparé pour le collectif d'habitants, pour les locataires et pour nous. On a bien mangé, on a pris un verre et je me suis couché assez tôt. Il a pas plue la nuit depuis le début du convoi, j'ai toujours super bien dormis dans ma tante que je partage avec Etienne (dit Etienne le casque vert) qui est un ami de l'autre Etienne.

Le lieu est intéressant donc on décide de prendre une journée de repos sur place avec l'invitation du collectif. Beaucoup de cyclistes doivent quitter le convoi maintenant par obligation professionnel. Une partie du bois est entreposée au Château. C'est un lieu qui a déjà une histoire dans le social. Il a servi de centre de désintox puis de centre d'accueil pour migrants après le démantèlement de la "jungle" de Calais. Maintenant le collectif qui habite le château veut notamment faire des résidences d'artistes, de l'événementiel, de la transformation alimentaire et du brassage de bière.

le collectif d'habitants du château 
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2 juin

Moi je le savais, je l'avais dit aux autres la veille d'ailleurs, je l'ai redit en partant "ce soir on dort à Luc en Diois les amis !".

Mercredi 2 juin on est parti à 8h bien reposés de la veille. On avait pu renforcer les systèmes à l'atelier et surtout on partait pour une étape sur de l'asphalte tout du long et pas sur du gravier. C'est moins sympa, on était doublé par les bagnoles mais on est aussi beaucoup plus performants. A 13h on déjeune à Crest, vers 15h30 on était à Die et là on savait que c'était gagné. On est arrivé à Luc vers 17h déjouant tous les pronostiques pessimistes basés sur les vitesses moyennes des jours précédents.

arrivé à Luc 

C'était une expérience assez hors du commun qui m'a beaucoup inspiré. Pourquoi pas monter une association de livraison de bois ou de déménagement à vélo ? On est rodé maintenant, si on repartait demain on la ferait vraiment en 3 jours la livraison. Où un groupe de musique qui déplace ses instruments avec des remorques et va de concert en concert à travers la France ? C'est pas si lourd que ça à tirer finalement une remorque je trouve.

terminus face à la montagne 

Bravo à toute l'équipe de cyclistes et à Clément, l'homme de l'ombre, c'est beau ce qu'on a fait.

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Publié le 19 juin 2021

du 3 au 9 juin

On a pas volé quelques jours de repos/fête dans l'ambiance relax du Diois, samedi matin sur le marché en terrasse, soirées feu de bois et guitare. Ya eu un petit festival avec un concert, de la dense et de l'acro-yoga organisé par Chriss au Tas de Fumier.

 marché de Die en terrasse et concert jazz au Tas de Fumier 
 festival au Tas de Fumier

On a repris le chantier de la maison tranquillou notamment préparer de la matière pour l'enduit avec de la terre, de la paille, de l'eau et du crottin.

J'ai bien profité de mes dernières jours dans la Drôme et je compte bien y retourner. Le Muscardin et le Diois en général c'est quelque chose à voir.

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Publié le 24 juin 2021

Le 25 juin se déroule le weekend de rencontre des Greniers d'Abondance (LGA), dont je suis membre. C'est une asso qui étudie les vulnérabilités du système alimentaire actuel face aux grandes crises à venir (changement climatique, effondrement de la biodiversité, épuisement des ressources ...). La rencontre se déroule dans l'Oise à l'Hermitage, je dois donc remonter vers le nord pour m'y rendre.

Mercredi 9 juin je compte partir de Luc pour arriver à Lyon et dormir chez mon (autre) ami Arthur, celui qui a justement co-fondé LGA avec Felix. C'est 210 km avec uniquement de la descente pour les 80 premiers kilomètres. Je comptais sérieusement tout faire à vélo, j'y serais surement arrivé, mais j'ai été conseillé par Arthur de prendre un TER de Vienne à Lyon pour éviter l'entré dans la métropole. J'ai quand même pédalé un bon 170km, mon record jusque là, avec pas mal de vent de face à partir de Crest. J'ai passé la soirée avec Arthur et ses colocs.

Lyon, Rhône

Le lendemain, jeudi 10 au matin je fais Lyon-Roanne en train et je finis les 60km en vélo jusqu'à Saint Léon dans l'Allier où je suis accueilli par Cécilia et Sylvain que j'avais connu par le groupe Entraide Maraichère. Le surlendemain, vendredi 11, j'étais complètement éclaté. J'aurais été totalement incapable de refaire une étape de vélo. J'ai péniblement travaillé au jardin le matin et j'ai dormis toute l'aprem. Le soir ils me parlent d'un collectif intéressant à 80km, All Terre Natif, de là que je contact directement.

Saint-Léon, Allier

Samedi 12 à 12h Greg m'invite à venir, à 13h je suis parti, 80km et vers 17h j'y arrive. Greg c'est donc le propriétaire du lieu. Il est installé là depuis 5 ans. C'est un ancien pompier de Paris. C'est un gars vraiment intéressant qui a énormément développé son autonomie. Il a récuré son puit et construit un château d'eau tout seul. Avec des amis il a construit une petite maison en Kerterre avec du bambou, de la chaux, de la paille et de l'argile. Il a pour projet de construire une sphère géodésique. Son potager en perma est vraiment très intéressant et assure l'autonomie en légume du lieu. Il élève des poules, des canards, des cochons, des chèvres, des moutons et une ânesse. Il fait lui-même l'abattage et le dépeçage des bêtes, puis le conditionnement des pièces de viande, la confection des pattés, des saucisses et des terrines. Sans rentrer dans pleins de détails c'est un lieu vraiment intéressant mais auquel on pourra reprocher une organisation un peu chaotique. Pendant la semaine que j'ai passé là-bas j'ai surtout fait de l'intendance, de la cuisine et de la réorganisation des espaces communs pour les rendre un peu plus fonctionnels et propres.

All Terre Natif 

Cérilly, Allier

Complètement par hasard j'ai appris que mon ami Adrien était à Polymorphe. C'est est une asso implantée sur une ferme juste à côté de All Terre Natif qui sert surtout de résidence d'artistes. Adrien est bénévole là-bas avec 3 filles, Cécile, Marion et Arianne. J'ai rencontré les gens de Polymorphe à une soirée organisée à l'école Steiner de la Mhotte. A cette soirée j'ai aussi rencontré des gens de la Baume qui est un autre lieu alternatif que je regrette ne pas avoir vu. Je suis par contre allé visiter le terrain de Polymorphe le jour de mon départ le lundi 21 juin, jour de la fête de la musique.

Lucil sur le terrain de Polymorphe 
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Publié le 15 juillet 2021

Depuis l'Allier pour arriver vers Compiègne dans l'Oise j'ai environ 400 km et je vais évidement repasser par la région de Paris. Donc je vais faire une étape chez la famille dans les Yvelines, à mon point de départ, violant ainsi ce que j'avais dit au tout début de ce carnet sur la maison de mes grands parents. J'ai 300km pour arriver dans les Yvelines. Très raisonnablement j'ai découpé en 3 jours de ~100 km. Première étape le 21 juin chez Jean Claude et Marie-Jo que j'avais connu au début du voyage, encore merci à eux. Pour le 22 juin, j'ai recherché un couchsurfing vers Orleans. J'ai envoyé 10 demandes, j'ai reçu 5 réponses dont 5 négatives. Aucune importance, je pédale toute la journée et vers 19-20h je tape aux portes, "bonsoir, je recherche un endroit ou dormir cette nuit". Je tape à une dizaine de portes avant d'arrivé chez Yvette et son mari Dédé. Quand Yvette m'accueille chez elle elle me parle de Nus et Culottés, qu'elle regarde parfois cette émission à la télé, qu'elle trouve ça super. Je lui raconte que j'ai rencontré Nans pendant le voyage, que j'ai même participé à construire une piscine chez lui dans la Drôme.

merci Yvette

Le lendemain mercredi 23 juin j'arrive chez la famille, je fais une journée de pause car je suis un peu fatigué de ces 300km en 3 jours. Le 25 juin je me prends un train de Marly le Roi jusqu'à Compiègne et je finis 20km de vélo jusqu'à l'Hermitage.

 l'accueil de l'Hermitage

l'Hermitage c'est un lieu dont l'histoire est liée à celle de la guerre de 14, les chemins de forêt autour sont d'anciennes tranchées côté français. Il parait qu'il reste des traces d'obus dans les arbres. On a eu droit à une visite de Jean, un responsable du lieu. En 1951 le lieu est racheté par une communauté de lépreux pour en faire un lieu de soin et une association est fondée. Jean et la plupart des membres actuels du collectif sont des enfants des cadres de cette asso. Aujourd'hui ils font du maraîchage, de l'événementiel comme le séminaire de LGA justement, de l'accompagnement numérique, ils accueillent une brasserie, une entreprise d'aquaponie, il y a 35 salariés en tout. En juillet par exemple il accueillent la Convention Citoyenne pour le Climat. C'est assez foisonnent, en 3 jours je n'ai pas saisi tout ce qu'ils font ici.

LGA c'est une asso qui étudie les vulnérabilités du système alimentaire actuel (ce qui comprend l'agriculture et l'élevage mais aussi les camions qui transportent la nourriture, les moulins qui transforment le grain en farine, les grandes surfaces etc) face aux "menaces globales", réchauffement climatique et destruction de la biodiversité notamment. C'est un sujet qui se pose déjà à nous. En avril dernier le gel a détruit une très grosse partie des bourgeons des arbres fruitiers qui avaient éclot à cause des chaleurs inhabituelles du mois de mars.

Le WELGA de cette année est la deuxième édition, la première c'était l'année dernière dans les collines de Bugey à côté de Lyon. Comme l'année dernière on a discuté les projets en cours comme CRATer, le projet sur les scénarios de prospective, quelques projets d'écriture d'articles comme celui que je pilote sur les ressources de la mer. On a fait un atelier débat et un autre sur des propositions pour un programme présidentiel (2022 c'est l'année prochaine héhé). On a aussi eu les retours d'expériences de Ulysse et de Typhaine qui ont voyagé à vélo pour interviewer des maires de village. Ulysse a visité des villages normands représentatifs de la région et leur a demandé comment il s'organisaient face au changement climatique et Typhaine a visité des villages "écologiques" et leur a demandé comment ils s'y étaient pris pour s'organiser de cette manière. Ce fut une belle occasion de rencontrer les autres membres de l'asso qui sont un peu partout en France.

un petit noyaux de membres actifs de l'asso 

Trois jours comme ça ça passent très très vite, c'était très inspirant de revoir tout ce monde et de rencontrer aussi des nouveaux.

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Publié le 31 juillet 2021

Haramont, Aisne

du 27 juin au 21 juillet

Dimanche 27 juin vers 16h je quitte l'Hermitage en même temps que presque tout le monde et je vais 20km plus loin aux Jardins de la Fontaine Pareuse ou habite Nico, propriétaire du lieu, et 2 personnes en service civique avec l'association de Nico. J'ai connu ce lieu par wwoof, je cherchais un truc pas loin de l'Hermitage et je suis tombé sur quelque chose qui vaut le détour. Nico habite là depuis 2005 sur ce terrain de 3.5 Ha. Il est complètement immergé dans la forêt et divisé en 2 parties: un espace de vie et un espace de production végétale qu'on appelle "le maraîche". Dans l'espace de vie il y a une maison que Nico a construite avec des bénévoles il y a quelques années et qui sert d'espace commun, d'autres habitations éco-construites avec différentes méthodes (comme le kerter ou le superadobe) en cours d'achèvement qui peuvent accueillir des visiteurs, un grand abri qui sert de cuisine commune. Il y aussi un poulailler, une chèvre rescapée d'un élevage conventionnel, une salle de musique avec un piano, une batterie, une guitare et d'autres instrus. Au maraîche il y 3 serres, une marre, et des cultures sur buttes. Le maraîche a pour fonction de contribuer à l'autonomie alimentaire de la Fontaine, on ne vend pas de surplus. Les besoins alimentaires sont complétés par des achats auprès d'une coopérative autogérée qui propose des tarifs particulièrement attractifs et des produits de très bonne qualité.

 les semis au maraîche à gauche et la cuisine commune à droite

Pendant la période ou j'étais à la Fontaine les gros chantiers, en plus du maraîche, c'étaient l'ensemble salle de bain + sellier en colombage terre-paille et le super adobe. Le super adobe c'est une méthode d'éco-construction qui consiste à empiler des sacs de terre comprimée et qu'on a choisi d'enduire avec un enduit très sableux. Moi j'ai bossé presque uniquement sur le premier chantier, je suis arrivé au moment ou on finissait de poser les poutres. Quelques jours après mon arrivé à la Fontaine une colonie de ~30 scoutes de Belgique (que des filles à part quelques encadrants), plus habituées aux plages de Croatie qu'à l'enduit terre-paille mais contraintes par le contexte sanitaire, sont arrivées. Je peux vous dire que ça a été un sacré choc des cultures. Un choc matérialisé par le premier petit-dej: flocon d'avoine, noix et raisins secs pour les pareux (auxquels je m'inclus), pains au lait éco+ et imitation bas de game de nutella pour le groupe de scoutes belges.

 chantiers douche et sellier à gauche et au milieu et super adobe à droite

Avec elles on a confectionné l'enduit, c'est à dire extraire ~3m^3 de terre en profondeur au maraîche, parce qu'il nous faut de la terre très minéral, la transporter jusqu'à une cuve où on la mélange à de l'eau avec un malaxeur, un genre de batteur électrique géant de 1600 W, et qu'on la tamise pour faire ce qu'on appelle de "la barbotine" ou "barbote". C'est le premier ingrédient de l'enduit. Le reste c'est de la paille qu'il faut hacher, de l'herbe qu'il faut tondre et du sable qu'il faut pelleter et transporter avec des sceaux. Ensuite tout ça doit être homogénéisé avec les pieds, dans une grande cuve. D'ailleurs il a fallu la bricoler avec des bous de taule cette grande cuve. Je peux vous dire que ça été un sacré chantier rien que de produire l'enduit. C'est une procédé que j'avais déjà vu pratiqué de façon très semblable dans la Drôme, au Muscardin, même si je n'en avais pas parlé ici. Au Muscardin on mettait du crottin aussi dans l'enduit.

 d'autres étapes de production de l'enduit: barbote à gauche et homogénéisation de l'enduit à droite

En parallèle du chantier enduit une équipe posait des branches de noisetier entre les poutres pour servir de support à l'enduit. Il y a une méthode assez précise pour appliquer l'enduit pour qu'il adhère bien au mur. C'est assez facile de faire un joli mur qui se casse la gueule en séchant, ça demande un certain savoir faire que Nico maitrise, autant que je puisse en juger par les divers constructions présentes sur son terrain, très bien.

Nico en application d'enduit dans la future salle de bain 

A la fontaine on élève des poules pour les oeufs mais aussi pour la viande. 2 fois par an Nico organise l'exécution et le dépeçage de quelques poules. Je me suis porté volontaire pour tuer les poulets qui serviront de viande pour le kebab de départ des scouts. Nico, Martin et moi on c'est levé à 5h30 ce matin là pour arriver avant l'aurore au poulailler pour limiter le stress des bêtes. Le mode opérationnel est le suivant, on rentre dans le poulailler, on choisit l'animal, on le sort, on le caresse doucement, prière, on lui fracasse le crâne avec un gourdin, on le pend par les pattes, on l'égorge avec un couteau. Là c'était le moment le plus dur avec le vidage des boyaux. L'animal convulse, est-ce qu'il est encore vivant ? Que ressent-il ? On répète ça plusieurs fois jusqu'à avoir la quantité de viande qu'on veut. Ensuite on plonge les cadavres dans le l'eau bouillante, on les déplume, on coupe l'oesophage, on ouvre le scrotum bien grand, on met la main en entier dedans pour arracher les entrailles, on coupe la tête, on coupe les pattes et on passe la carcasse au chalumeau. Les abats, les têtes et les plumes sont simplement enterrés au maraîche.

Moi j'ai pratiqué le veganisme pendant 4 ans mais j'ai jamais eu de problème avec le fait de butter rapidement un animal bien traité pour le bouffer. Ces poules on eu une vie paisible, ont passé un court moment désagréable et nous on va manger de la viande top qualité dans un bon kebab maison (le kebabos). d'un strict point de vu utilitariste ya pas de problème.

merci mes poulettes, vous n'êtes pas mortes en vain 

Le vrai sujet pour moi c'est pas viande ou pas viande. Entre d'un côté du sucre en poudre industriel, produit à partir de bétraves gavée de produits de synthèse qui contaminent l'eau et les écosystèmes, qui réclame de longues étapes de transformations énergivores, qui son baladées en camion à travers la France, emballées sous plastique et qui cause du diabète et l'hypertension et de l'autre côté ma viande de poule artisanale, élevées en pleine air avec leurs congénères, nourries avec les restes de cuisine et des graines de tournesol bio j'ai une idée assez précise sur lequel des deux pose le plus de problèmes. Je pense aussi que l'industrie de la viande fonctionne aujourd'hui d'une façon aussi terrifiante parce qu'on a mis en place une division du travail qui dilue la responsabilité de ce qui ce pratique sur un grand nombre d'acteurs ce qui permet en bout de chaîne au consommateur qui va acheter sa viande en barquette à Lidle de bien fermer les yeux sur ce qui c'est fait en début de chaîne. J'invite chacun à regarder bien en face les implication de ses choix alimentaires et à en assumer le plus possible soi même la réalisation. Si la convulsions d'un poulet égorgé vous importunent alors il me semble que ça devrait avoir des implications sur votre régime alimentaire.

Après le départ des scouts on c'est retrouvé en beaucoup plus petit comité dans une ambiance avec plus de calme et d'écoute. Je me suis senti bien à la Fontaine. Le dernier dimanche que j'ai passé à la fontaine Nico c'est lancé dans la construction d'un radeau pour emmener sa copine descendre la rivière à côté, quel romantisme. Il a fait ça tout seul en une matinée c'était assez impressionnant à voir. J'ai été très convaincu par ce lieu, très vite, dès mes premières heures là-bas où on fait de la musique, de la danse, des arts martiaux, du théâtre, où on se lève avant 8h pour bosser, où on mange bien et on fait la cuisine ensemble. J'ai rencontré vraiment des gens super, beaucoup de gens qui étaient déjà venu à la Fontaine et qui reviennent. Ca sera très certainement mon cas aussi.

Les derniers jours à la Fontaine 
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Publié le 11 août 2021

Abbaye du Lieu restauré

17 juillet 2021

A la Fontaine Pareuse j'ai rencontré Vincent et Mathilde, un couple de trentenaires qui ont lâché leurs boulots plutôt confortables de cadres pour développer un mode de vie nomade. Il voyagent en stop avec une grande tente, ils font beaucoup de récup, il travaillent comme bénévoles avec des maraîchers, avec des assos pour les droits des réfugiés aussi. Contrairement à moi ils ont même renoncé à demander leur droit au chômage mais eux comme moi sommes en train de développer un mode de vie le moins intensif possible en argent, qui libère le travail de la contrainte marchande. Vincent le résume ainsi: "on a du stock [d'argent] mais on a aucun flux". Mathilde et Vincent sont des habitués de la Fontaine, des vrais pareux quoi, qui étaient déjà venu la saison dernière. Or peu de temps après notre rencontre ils quittent la Fontaine pour s'installer à l'Abbaye du lieu restauré, à ~8 km de la Fontaine.

Abbaye du lieu Restauré 

Cette abbaye a été fondé au 12em siècle par l'ordre des Prémontré. Elle sera convertie en ferme après la Révolution, le choeur servira notamment de grange. Aujourd'hui le lieu a toujours une fonction de production alimentaire. Il y a deux maraîchers, Angélique et François que Mathilde et Vincent aident pour quelques semaines. Samedi 17 juillet je passe faire un coucou, on m'avait dit que j'étais bienvenu pour venir visiter une journée. C'est un très joli lieu, très atypique. Il n'est pas courant de voir des poireaux poisser au pied d'une abbaye.

 visite de l'abbaye par Mathilde et Vincent
Angélique et François sur leur parcelle 
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Publié le 11 août 2021

Hazebrouck

du 21 au 25 juillet

La Fontaine Pareuse c'est en Picardie, or la famille de ma mère vie dans le Nord-pas-de-Calais à Hazebrouck, pas très loin de Lille. ça aurait été con de pas passer faire un petit coucou. Mon projet en quittant la Fontaine c'est d'arriver à Lille directement depuis Haramont, c'est à dire faire 200 km dans la journée pour battre mon précédant record de 170 km, en suite mes grands parents viennent me chercher pour me ramener chez eux à Hazebrouck. Bon je vais pas y arriver, j'ai une douleur dans le genou gauche qui va se réveiller lentement et s'aggraver au cours de l'étape. C'est une douleur qui ressemble beaucoup à ce que j'avais connu quand je faisais de la course à pied mais que j'avais jamais eu sur un vélo. Le vélo c'est quand même beaucoup moins violent que la course à pied sur les articulations. En plus le nord c'est pas si plat qu'on le dit finalement, il y a beaucoup de petites collines, ça monte, ça redescends en permanence. Je vais finir le trajet en TER de Busigny directement jusqu'à Hazebrouck.

Mon oncle François et ma grand mère sur la digue de Dunkerque 

Mon oncle François est paraplégique et fait aussi beaucoup de vélo. Il revenait juste de 2 semaines de vélo dans le Jura en fait. Il a un vélo où on pédale donc avec les bras qu'il m'a laissé essayer. C'est une belle machine. son frère Henri se déplace essentiellement en vélo-train et leur père est un ancien cycliste route qui a fait beaucoup de longue distance et se passionne pour le Tour de France. Du côté de ma mère on peut dire qu'on est une vrai famille de cyclistes.

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Publié le 11 août 2021

du 26 juillet au 31 juillet

En juillet mon père Thierry a déménagé à Villabé dans l'Essonne. Je vais y passer quelques jours le temps de faire un coucou à la famille et de gérer le déménagement de mes propres affaires. Je n'ai vraiment pas eu la volonté de refaire la route à vélo jusque dans l'Essonne, j'ai pris un des deux seul TER de la semaine qui fait Lille-Paris pour pouvoir y mettre mon vélo. Je vais revoir ma tante Catherine, mon oncle François et ma grand mère Nicole. Je suis content de constater que tout le monde est globalement très enthousiasmé par mon projet de vie. Je suis en effet très satisfait personnellement par ce mode de vie qui ne pourra de toute façon que être provisoire et me conduira vers quelques chose que j'aurais vraiment choisi. Je n'ai encore aucune idée de ce que ce sera.

Je pensais passer au moins 2 semaines ici mais l'appelle de la route sera trop fort, "l'appel du large comme disent les marins" dira la grand mère. Elle ne croyait pas si bien dire: j'avais envie de retourner vers la Bretagne où j'ai fait une partie de mes études et la magie des réseaux sociaux me conduira à côtoyer un petit cercle de marins de Saint Malo.

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Pour partir vers la Bretagne j'ai besoin d'avoir des points de chute. A ce moment se qui compte pour moi c'est de pouvoir repartir et vite. Je recherche des chantiers d'éco-construction sur twiza et je trouve un truc à Plouray, à côté de ... pas grand chose. C'est sur la longitude de Lorient au milieu des terres. J'échange un peu au téléphone avec un des membres du collectifs, Romuald, et je ne me renseigne pas plus que ça sur le lieu ni sur leur méthode de construction. Je vais aussi sillonné le groupe d'entraide maraîchère de facebook et tomber comme ça sur le poste d'Estelle. Elle recherche quelqu'un pour l'aider à entretenir son terrain près de Saint Malo et propose aussi de venir "chiller en bord de mer". Trop bien ! C'est sur ma route mais un poste comme ça fait apriori beaucoup d'intéressés, elle va être complètement noyée sous les demandes. Mais ça passe, elle me répond et m'invite à venir chez elle à Saint Malo.

Dimanche 1er aout vers 10h Thierry me dépose avec mon vélo à Rambouillet avec le camion de sa boite. Encore merci à lui, ceci me permet d'éviter la peu intéressante sortie de la métropole de Paris. Je prévois de mettre 4 jours en suivant la Vélocénie jusqu'à Saint Malo. Lors de cette première étape je vais avoir quelques difficultés. Je pensais que ça serait facile de suivre le tracé simplement en suivant les panneaux mais pas du tout. Je suis obligé de faire demis tour plusieurs fois. Je suis seulement parti et ça va déjà pas. Clairement je suis parti complètement à l'arrache. Je ne sais pas par quelles villes je vais passer, je n'ai pas les gpx sur mon téléphone. La veille j'ai dormis 3 heures à cause du bruit de la route à Villabé. Clairement je ne me sens pas très bien et ça ne va pas s'arranger dans la journée.

 Rambouillet

Vers 11h Je rencontre un groupe de cyclistes avec lequel je fais un bout de route et qui rencontre les mêmes difficultés de navigations. Je les vois s'engueuler sur la route à suivre. Notre génération et la navigation c'est la cata, sans gps on est perdu, moi le premier. Je leur explique mon mode de vie avec assez peu conviction, mais ils sont quand même super réceptifs. "Par contre si tu prévois d'arriver au Mont Saint Michel en 4 jours reste pas avec nous, on doit pas avoir le même rythme". Je vais effectivement tracer ma route un peu avant la pause mangé.

Pendant cette étape je vais lentement sentir ma douleur dans le genou gauche se réveiller jusqu'à devenir plus qu'inconfortable. Quand j'arrive à Chartres j'appelle mon grand père Abel, ancien médecin, qui se montre rassurant "vas y doucement, fait moins de 100 km, mets du voltarene". J'étais en train de penser à abandonner dès la première étape. Je suis complètement déprimé, je décide de m'arrêter avant 17h, je ne sais même plus vers quelle ville. Je demande l'hébergement à des habitants. Ils acceptent mais ils doivent partir au travail à 5h se qui m'obligerait à commencer à ranger la tante au plus tard vers 4h20, clairement ça n'irait pas. Ils me laissent gentiment de quoi manger pour le soir.

Finalement je plante ma tante quelques kilomètres plus loin entre un champ de blé et un petit bois, bien à l'abris de la circulation et des regards. Entre 17h et le coucher du soleil je ne vais pas dormir, pas lire, pas écouter de musique ni de podcast, pas écrire. Je vais rester allongé sur mon matelas gonflable et me dire "alors Charles, c'est ça la vie que tu voulais ? T'es satisfait ? Qu'est-ce que tu vas faire maintenant ? tu vas peut-être même pas pouvoir continuer à faire du vélo comme avant".

panneaux de la Vélocénie 
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Lundi 2 aout je me lève vers 7h30, j'ai bien dormis, mieux que la veille. Je n'ai aucune douleur dans le genou, j'ai l'habitude, après quelques heures de repos elle se dissipe complètement mais je ne me fais pas l'illusion, elle va vite revenir dans la journée. J'ai pris la décision de tracer ma route en y allant molo. Je mets le gps maintenant, ça marche très bien, maps.me me propose toujours des trajets qui évitent la circulation.

Après peut-être 2h de vélo je me retrouve sur de la voie verte empruntée essentiellement par des cyclistes et par quelques marcheurs. Je passe presque tout le reste de l'étape sur des chemins forestiers en bon état et tout plats, les paysages du Perche sont beaucoup plus intéressants que vers Chartres, je suis vraiment content de faire du vélo dans ces conditions. Je ne m'en rendais pas compte mais j'étais hier dans un environnement désagréable qui nuisait à mon bien-être. Toute la journée je croise d'autres voyageurs à vélo et presque aucune voiture. En mettant du voltaraine sur mon genou et en prenant un doliprane vers 11h la douleur est très gérable, heureusement que le parcours est très plat.

 vue de la voie verte en Corbon et Condé

En fin de journée je fais la rencontre le Philippe et Vincent, deux cousins qui retrouvent des copains à Saint Malo et qui se sont donné le défit de faire la route en vélo, le reste de la bande ne s'est pas chauffé. Je fais un bout de route avec eux. Ils avaient prévu de passer la nuit au camping. Je décide de les accompagner et de passer la soirée avec eux à Mêlé-dur-Sarthre près de Mortagne. Une décision qui aura un prix (6€), mais qui me placera dans des conditions un peu plus conviviales et me permettra de prendre une douche et de recharger mes appareils.

Vincent et Philipe  
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Mardi 3 aout je me réveille vers 7h30, je remballe le matos de bivouak, je vais prendre le petit dej avec Pierre que j'ai rencontré la veille et qui m'offre le café, je dis au revoir à Vincent et Philipe et je trace ma route. Il me reste 220 km, sans mes problèmes de genou ça serait largement plié en 2 jours.

La veille j'ai cassé mes écouteurs donc je fais une étape à Alençon pour m'en racheter. Mis à part cette regrettable dépense je réalise qu'il est assez facile et relativement confortable de voyager sur des distances relativement importantes avec très peu d'argent. Vous n'avez pas idée des quantités de nourriture que les gens sont prêts à vous offrir si vous leur demandez poliment. Il faut dire aussi que le voyageur à vélo est un personnage qui suscite la sympathie. Il peut susciter la pitié aussi peut-être dans certaines circonstances.

C'est plutôt joli Alençon, ya un petit côté Rouen je trouve 

Je vais bien tracer ma route cette journée là, ~130km malgré un passage difficile dans la forêt vers Bagnoles de l'Ornes où j'ai dû pousser le vélo un moment. J'ai pris de l'iproféine et du voltaraine, je n'ai presque pas senti mon genou de toute la journée. Je pose la tante vers 19h à 10km de Saint Hilaire dans une prairie plus ou moins en friche le long de la voie verte. J'entends les oiseaux et la rivière, un peu les voitures au loin aussi mais le trafic est très faible. C'était vraiment une belle journée.

un bivouak de prince 
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mercredi 4 aout me réveille assez tard, vers 10h, sous la pluie. Je remballe la tente toute mouillée, aucune importance, de toute façon je serai accueillit par Estelle à Saint Malo tout à l'heure. Je reprends la route avec une certaine euphorie car je suis à moins de 60km du Mont Saint Michel. Je quitte rapidement la forêt pour les grandes prairies qui caractérisent les environs du site, je suis très impressionné par l'immensité des espaces dont disposent les moutons qui y pâturent. Il y a une émotion particulière à s'approcher en vélo d'un site comme le Mont Saint Mich après plusieurs jours de voyage, quelques chose qui n'est pas comparable à l'apercevoir à travers une vitre depuis l'habitacle insonorisé d'une bagnole.

le Mont Saint Michel 

Au pied du mont il y a un service de gardiennage de vélo à 2€ la journée. J'y laisse mon vélo et je monte à pied. Le Mont Saint Mich c'est cool de le voir de loin, de prendre des selfies devant pourquoi pas, mais c'est moins intéressant d'y monter je trouve surtout en cette saison. C'est vraiment l'archétype du site contaminé par le tourisme de masse malgré l'éloignement récent des parkings où on se marche dessus et où tu peux acheter 20€ ta galettes complète en terrasse et 11€ ton ticket de visite de l'abbaye. Je fais un tours de 45 min et je repars vers Saint Malo. Je suis content d'y être allé, clairement ça aurait été con de pas le faire pour économiser 2€ et 1h.

La suite de la promenade c'est sur le bord de mer. Estelle me donne rendez-vous au bar du camping de la cité l'Alet ou elle rejoignait des copains. Je la retrouve à 19h30. On a une super belle vue sur la mer, couché de soleil, musique, c'est vraiment un très beau coin de Saint Malo. Estelle m'a offert la moule frite et une pinte de bière, elle me présente ses copains marins, je suis vraiment bien accueillit. Elle m'explique qu'on va dormir sur le camping, que je peux planter ma tante à côté. Aïe ma tante elle est trempée du coup, j'essaye de la faire sécher en catastrophe avant la fin du jour. Mais elle connait les gens du camping, ils vont avoir pitié de moi et m'offrent de dormir dans la caravane réservée pour les barmans si l'un d'entre eux est trop bourré pour rentrer chez lui, ce soir elle est libre. C'était nickel. En plus ce soir là j'apprends que mon ami Adrien est à Saint Brieuc et qu'Eric va passer à Saint Malo dans 2 jours. Trop bien, on va se retrouver à Saint Malo et Adrien pourra me déposer à Saint Brieuc et m'offrir un nuit d'hébergement chez sa mère ce qui me rapproche de ma prochaine étape.

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Publié le 16 août 2021

du 4 au 8 aout

Je ne connaissais pas Saint Malo, la cité corsaire. C'était vraiment super de pouvoir la découvrir en étant hébergé chez Estelle et son Frère Edouard. Estelle connait la ville depuis qu'elle est petite, elle a 30 ans, elle reprend le terrain de son père de 1/2 Ha à Pleurtuit à juste à côté de Saint Malo qu'elle rachète à ses frères et soeurs, elle a besoin d'aide pour entretenir un peu le terrain, c'est pour ça que je l'ai connu, elle est formatrice pour les bateaux à voile. Elle a d'ailleurs un projet super intéressant, elle a co-monté une asso qui va acheter et rénover un vieux cargo à voile et l'utiliser pour acheter du rhume, du café et du cacao et Amérique du sud dans une démarche de commerce équitable et revendre en Europe. C'était super intéressant pour moi de côtoyer des marins pendant quelques jours, qui savent lire une carte navale et qui font de la longue distance. Discuter avec eux m'a un peu ouvert à ce milieu que je connais très peu, m'a donné envie de lire Moitessier, la grande référence littéraire des marins à voile.

Saint Malo c'est plutôt sympa 

J'ai vraiment forcé sur le genou en 4 jours, je boite. Estelle me dépose chez le médecin, il m'occulte le genou 30 seconds, appuie sur ma rotule, "ah vous voyez c'est là que vous avez mal", il me dit que c'est pas grave et me prescrit des anti-inflammatoire et un protecteur gastrique.

J'ai été très bien traité par Estelle pendant 3 jours. Pour mon anniversaire elle m'a sorti à Saint Suliac où a retrouvé ses copine Marie et Julie. Mais ça a juste pas été facile de bosser avec elle à cause de son organisation. C'est quelqu'un par exemple qui change de plan sans te prévenir. Elle n'est pas rentré le dernier soir contrairement à ce qu'elle avait annoncé la veille et c'est moi qui ai dû appeler pour le savoir alors que j'avais fait toute la cuisine. Je considère que j'ai été réglo, j'ai bien désherbé le terrain, nettoyé le poulailler, paillé quelques arbres et donc fait la cuisine.

Samedi 8 aout je retrouve mes camarades de prépa Adrien et Eric à Saint Malo, on passe l'aprem ensemble, Adrien me prend avec mon vélo chez sa mère qui m'offre l'hospitalité pour la nuit. Encore merci à eux.

Adrien et Eric 
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Publié le 17 août 2021

Plouray, Morbihan

du 9 au 14 aout 2021

Le 9 aout je pars de chez la mère de Thibault à 11h pour aller sur un chantier participatif à Plouray. Le terrain appartient à 2 couples, Romuald et Sandra d'un côté, Thibault et Sandrine de l'autre. Techniquement il y a 2 chantiers sur le terrain, chaque couple construit sa maison. Ils ont chacun un enfant, respectivement Alice et Charlie. J'arrive à Plouray vers 17h30. C'est la fin de la journée de travail, ils sont en train de partager des biscuits bretons et une infusion à la menthe. Je rencontre aussi un jeune couple de naturalistes, Geoffrey et Laila, qui voyage avec une ancienne ambulance aménagée.

Laila devant son ambulance aménagée, dedans c'est super cosy 

Ils veulent s'installer dans la région pour monter un lieu où ils feront des formations sur les plantes, les animaux et les interactions. Ils s'intéressent en particulier à la méthode GREB pour auto-construire leur future maison, celle qui précisément est utilisé sur ce chantier par les 2 couples. Pour la faire court le GREB est une méthode de construction inventé au Québec réputé simple et pas chère avec une structure bois et une isolation en paille.

J'ai surtout bossé avec Romuald. C'est une ancien ingé en informatique justement. On a pas mal discuté ensemble. Il a fait beaucoup de recherche sur les maisons passives, sur l'autonomie énergétique, sur la gestion de l'eau, sur les matériaux. Il m'a donné beaucoup d'info sur la façon dont il a conçu sa maison, l'inclinaison des murs pour prendre beaucoup de rayonnement solaire en hivers et le moins possible en été, il m'a montré ses calculateurs de dimensionnement de batterie selon le niveau de perte par effet joule, de dimensionnement de la cuve à eau basé sur les séries journalières de la pluviométrie des années précédentes.

 les calculateurs de Romuald

Romuald c'est quelqu'un de bien renseigné sur les grandes crises systémiques et il est justement dans une démarche de se préparer à tout ça. Mais le chantier qu'il mène est un peu béton/machine, ils utilisent que des matériaux neufs qu'il fait livrer plastifié par camion. Il a coulé une grande quantité de béton pour sa chape compte tenu de l'ampleur des travaux, 180m2, et de la pente du terrain, un choix qu'il regrette. "J'ai grillé des années de sobriétés avec tous ce béton". Ne pas le faire c'était risquer que sa maison se casse la gueule et il a la responsabilité d'un père de famille.

des grosses machines et des matériaux neufs livrés sous plastique par camion 

Après le départ de Laila et Geoffrey le lendemain de mon arrivé j'étais le seul twiza et les membres du collectif ne vivent pas sur le chantier donc j'étais tout seul à partir de 18h jusqu'à 10h le lendemain. Les 2 couples sont vraiment des gens très charmants mais la qualité d'accueil était quand même pas ouf. La seule pièce de vie c'était une "cuisine" dans un conteneur avec des conserves, du café, des oeuf, une seule plaque électrique, le matin j'avais du pain rassis qu'ils avaient chez eux et qu'ils allez filer aux poules, même pas de beur, même pas confiture, même pas de planche à découper, presque pas de légumes frais. J'avais jamais été aussi mal traité alimentairement depuis le début du voyage alors que je passais la journée à bosser sur la construction de leur maison. "Pour moi la nourriture c'est fonctionnelle me dit Romuald". Bon ça c'est pas très bien finit entre nous.

Les rencontres que j'ai fait sur ce chantier m'auront au moins permis d'entendre parler de deux lieux intéressants pour la suite du voyage: la Bascule Argoat et le Bois du Barde. Je les contact tout les deux, le 14 aout le Bois du Barde organise un Fest Noz où on peut camper et le 15 le Bascule organise une formation sur la primaire populaire. Pendant ces événement j'aurai l'occasion de refaire des rencontres qui m'aiderons à avancer.

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Publié le 31 août 2021

samedi 14 aout 2021

Samedi 14 je quitte le chantier de Plouray avec toutes mes affaires vers 18h pour allé au Bois du Barde à ~10km. Je sais que je vais pouvoir camper là-bas. Je vais aussi me renseigner sur d'autres lieux intéressants à aller voir dans le coin.

Quand j'arrive j'apprends que l'altertour passe par là justement ce soir. L'altertour c'est un voyage à vélo organisé par Alternatiba, une association altermondialiste assez incontournable dans le milieu. C'est trop drôle, tout le monde pense que j'en fait parti. Je vais d'ailleurs me renseigner pour rejoindre le groupe. C'est possible mais pour plusieurs raisons je ne vais pas faire ce choix. C'est un assez gros groupe de 30-40 personnes qui se scinde et se reforme régulièrement avec un turn over assez important. J'ai pas ressenti une forte cohésion dans leur groupe, ils ont l'air de passer très vite sur les lieux qu'ils visitent, avec le nombre qu'ils sont ils ont une lourdeur d'organisation assez forte et à 30€/jour ça n'est pas tout à fait ma philosophie du nomadisme autonome. Je me vois par contre tout à fait bouger avec 1 ou 2 compagnon-e-s sur quelques étapes. J'ai d'ailleurs recontacté Kevin Simon du Permacooltour, un petit collectif de cyclo-voyageurs. Il est en solo aussi depuis un mois.

Tout seul on va plus vite,

à deux on va plus loin

Un Fest Noz c'est une fête traditionnelle bretonne. Il y a une initiation à la danse au début et un groupe de musique traditionnelle. J'ai bien sûr participé, j'aime beaucoup la danse. J'ai aussi aidé à faire des crêpes, on m'en a offert une et une bière. A la fin de la soirée il y avait une scène ouverte ou j'ai joué de la guitare avec d'autres musiciens.

le groupe de musique trad 

J'ai rencontré Grégoire à la soirée qui voyage avec l'altertour. Je lui ai demandé quels étaient les lieux qu'il a trouvé le plus intéressant. Il m'a parlé de l'Atelier Z dans le Finistère. Je comprends que c'est un endroit où on bricole et où on s'intéresse aux low techs. j'essayerai de les contacter pour savoir se qu'il est possible de faire ensemble. J'ai rencontré Hélène aussi. Elle a beaucoup voyagé à vélo elle aussi, elle a pédalé jusqu'en Turquie. Elle est en woofing au Bois du Barde et le lendemain elle m'a fait visiter le terrain. J'ai aussi revu Solène que j'avais rencontré au Blocage de Italie 2 organisé par XR il y a 2 ans et que j'avais revu au Moulin Bleu au tout au début du voyage.

Mais mon genou ne va pas mieux, est-ce que je vais pouvoir refaire du vélo sur de la longue distance avec mon chargement ? La Bretagne est une région tout de même assez accidentée. En tout cas demain je suis inscrit à l'événement de la Bascule. ça fera exactement 6 mois que je suis partie le 15 mars.

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Publié le 31 août 2021

le 15 aout au 18 aout 2021

Aujourd'hui, dimanche 15 aout, ça fait 6 mois que je suis parti en vélo. Hélène m'a fait visiter le terrain du Bois du Barde. Ils ont des chevaux, un âne, un bouc, des poules, une dizaine d'hectares avec beaucoup de forêt. Ils font pas mal d'événement culturels et ils ont une activité de camping. Je pars à 11h avec un groupe de cyclistes de l'Altertour à la Bascule Argoat pour suivre leur formation sur la Primaire Populaire.

 en route vers la Bascule

J'avais déjà entendu parlé de ce genre d'initiative. En 2017 déjà une candidate issue de la société civile, Charlotte Marchandise, avait remporté une primaire citoyenne. Son programme avait notamment été développé par Arthur Keller, bien connu dans le milieu collapso, mais elle n'avait pas obtenu ses 500 signatures ni reçu le moindre intérêt médiatique. Tel que je le comprends la primaire pop est un processus qui permettrait de faire émerger un-e candidat-e qui fasse consensus pour porter un programme écologique, sociale et démocratique à la présidentielle de 2022. C'est une plateforme web ou chacun peut s'inscrire et proposer dans un premier temps s-on-a candidat-e. Des élections se tiendraient dans un deuxième temps pour désigner l-e-a gagnant-e. Les candidat-e-s s'engagent à respecter un socle commun de 10 engagements.

Pour le moment j'adopte une position plutôt attentiste par rapport à tout ça. La qualité du texte des 10 propositions et Christiane Taubira pour le moment en tête des parrainages me laissent un peu tiède. On a aussi un Jean-Luc Mélenchon qui s'est dors et déjà présenté unilatéralement candidat à la présidentielle 2022 alors je suis pas certain de vouloir gaspillé mon énergie et mon temps dans une union des gauches à laquelle j'ai du mal à croire. Même si je la souhaite, c'est la désunion des gauches qui nous avait couté le deuxième tour en 2017, le score FI + PS était largement supérieur à celui du FN. Je veux bien m'y intéresser, en débattre, je suis même de ceux qui vont voté (et j'avais voté contre Le Pen en 2017; et je le referais) mais la politique c'est un milieu dont je préfère me tenir à l'écart.

La Bascule Argoat c'est, comme son nom l'indique, une antenne de la Bascule en centre Bretagne ("Argoat" ça veut dire "l'intérieur des terres" en breton) et la Bascule c'est une asso qui s'est donné pour mission de "mettre en réseaux les acteurs du changement". C'est un lieu de vie ou habitent 10 personnes mais la plus part sont en vadrouille quand j'arrive. Je verrai Romane que j'avais connu en Dordogne que quelques jours plus tard. Ils bossent beaucoup sur la rénovation de leurs locaux, sur le jardin, l'accueil de visiteurs. C'est un peu les vacances quand j'y suis. Pour l'alimentation ils ont leur potager et ils ont une relation d'entraide avec 2 maraichères, ils vont bosser 2 fois par semaines pour elles contre des légumes.

A la Bascule Argoat ils font de l'accueil de visiteurs. Je vais pouvoir rester là jusqu'à mercredi 18. En discutant avec les habitants je comprends qu'il y a un réseau assez dense de projets autonomistes dans la région. Etienne me donne accès au réseau du Groupe du Dimanche qui est un courriel d'info qui fédère tous ces projets. Je raconte mon projet de voyage et je suis contacté dans l'heure par Nancy qui construit son éco-lieu au Golo avec son mari et son fils et par Hugo qui est en train de lancer sa production de spiruline à Langonnet. Voilà deux projets qui semblent tout à fait intéressants, je suis bienvenue pour les aider.

 Etienne qui nous fait la visite du terrain 
Les gens de l'Altertour qui passent aussi par la Bascule 
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Publié le 2 septembre 2021

Langonnet

du 18 au 27 aout

Mercredi 18 aout je quitte la Bascule en fin de mâtinée pour aller à Koad ar Kelt, la micro-ferme d'Hugo, à Langonnet. C'est seulement 10km de vélo, heureusement, mon genou me fait hyper mal même sans forcer. Quand j'arrive je suis plutôt enthousiaste en voyant le terrain et je vais pas être déçu.

Hugo est de 1993 comme moi et il a déjà eu deux vies. Il a fait un bac pro de construction, reprit des études à Técoma où il finit majeur de promo et devient chef de chantier en IDF. Il avait une plutôt bonne situation, il allait se marier à 22 ans et il pète un câble, il lâche tout, son boulot, sa meuf, son appart. Il a bougé un peu et il a lancé un premier projet autonomiste dans la forêt vers Vannes. Il m'a montré des images le soir de mon arrivé. Il avait construit "tout un village dans la forêt". En partant presque uniquement de matos de récup il avait construit en 10 mois sa maison semi-enterrée, son atelier, son poulailler, ses toilettes sèches, son jardin en perma et son composteur. Il a fait un saut dans le vide assez impressionnant. Il s'est préparé pendant un an et demi pour mener ce projet, il avait fait les plans de tout ce qu'il allait construire et il faisait de la prépa physique. Il a été rejoint dans son projet par son père et sa copine de l'époque et des équipes de bénévoles l'ont aidé à plusieurs moments.

Avec pas grand chose on peut faire quelque chose

 Hugo dans sa forêt

Cette première ferme il a dû la quitter à cause d'un contentieux sur le PLU avec la mairie. L'année dernière il a acheté un grand terrain agricole dans la forêt où il va notamment produire sa spiruline et restaurer le vieux moulin en pierre et les bâtisses agricoles pour faire de l'accueil de visiteurs, 11 Ha en tout. Et il a le petit terrain constructible sur lequel il a son cabanon, un puit maçonné jusqu'au fond et il est en train de construire le bassin pour la spiruline et son labo de transfo. C'est sur ça que je l'ai aidé quand j'étais chez lui. "Koad ar Kelt" c'est du breton, ça veut dire la forêt celtique. Il aime bien les traditions ancestrales qu'il perçoit comme égalitaires et en symbiose avec la nature. Après l'Empire Romain les aurait perverti avec "le vin et les putes".

 son cabanon et les ruines dans sa parcelle de forêt

On est relié à aucun réseau ici, ni l'eau, ni l'électricité. Pour l'eau on a le puit et le récupérateur d'eau de pluie qui alimente une grande cuve et un filtre qu'on alimente avec des sceaux. Ici je prends des douches comme en étape, à la gourde, dans le jardin. Pour l'elec on a un panneau solaire et une batterie au plomb. Quand j'arrive l'extension de sa cabane est en court, il va y mettre la douche et la cuisine. Pour le moment la gazinière est à l'extérieur ce qui est un peu galère pour la cuisine mais ça fonctionne, on mange plutôt bien ici, il a des bons produits mais il faut aimer le riz.

Le projet d'Hugo comme il le résume c'est "la retraite à 32 ans", que tous soient sur les railles, les habitations construites, la production de spiruline et le potager lancés, le prêt remboursé, les arbres plantés, les chevaux clôturés. Il veut que tout soit en place pour sa femme et ses enfants le jour venu. Je lui ai aussi demandé se qu'il pensait d'un projet en collectif. Pour lui c'est pas bien du tout, le collectif c'est la merde, ça finit toujours par foirer, c'est ce qu'on appelle le PFH (putain de facteur humain).

La spiruline c'est un moyen pour lui de produire des aliments à très haute valeur nutritionnel facilement. La spiruline est une micro-algue qui vit dans des eaux légèrement salée, alcalines et très chaudes (30-40°C), notamment au Tchad, au Kenya, au Maroc et au Pérou. Elle fait partie des tout premiers organismes terrestres et sa consommation est ancestrale. Les Inca notamment la consommaient comme aliment à part entière. Son nom vient de sa forme de spirale. Elle est extrêmement riche en protéine (60-70%), vitamine, acide gras essentiels, minéraux et oligoélément. Pour en produire il faut quand même une pompe de quelques centaines de watt et il faut régler la question du chauffage. Hugo pense régler ça par méthanisation avec un composte chauffant.

On a fait une récolte, il a déjà installé un petit bassin chez sa mère. C'est assez incroyable, je consomme moi même de la spiruline de temps en temps depuis des années, j'en ai d'ailleurs avec moi pour les longues étapes, mais je n'en avais jamais mangé fraiche. ça n'a rien à voire avec la spiruline séchée. On dirait du jaune d'oeuf bien cuit et légèrement salé, c'est tout à fait bon même sans aucun assaisonnement.

 récolte de spiruline

Mais je ne suis pas dans la meilleur des formes physique. J'ai une côte fêlée à gauche, une contracture dans le côté gauche du dos et toujours ma douleur au genou gauche qui ne s'arrange pas. "Qu'est-ce qui se passe avec le côté gauche ? pourquoi c'est ça que tu abimes ? C'est ça qui t'empêche d'avancer. Ton corps te dit un truc". La gauche c'est traditionnellement ce qu'on associe à la rationalité par opposition aux émotions qui sont du côté droit. Hugo m'invite à réfléchir à mon problème de cette manière. Je suis plutôt ouvert à ça mais rien n'exclue non plus qu'il y ait aussi autre chose. J'ai vu un kiné qui n'a pas su dire quel était mon problème, il me recommande une éco-graphie. Je suis un peu déçu mais il vaut mieux arrêter le voyage là pour par trainer des lésions. Je réserve un train pour rentrer chez mon père à Villabé et faire des examens là-bas.

Je suis très content d'être passé par Koad ar Kelt, un bel exemple de projet autonomiste réalisé en grande partie en solo. Il m'a laissé tout les documents qu'il a conçu pour réaliser sa première ferme. J'ai de quoi étudier pour développer mon propre truc.

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Publié le 10 septembre 2021

du 27 au 31 aout

Vendredi 27 aout après la récolte de spiruline je dit au revoir et à la prochaine à Hugo et je vais 10 km plus loin, au Golo, un lieu dit proche de Plouray, un trajet assez court pour que je ne sente pas du tout mon genou. Sur ma route je repasse devant la Bascule donc je passe faire un coucou. Les basculeurs que j'avais rencontré à la formation ne sont pas encore rentré de vadrouille par contre je retombe sur Romane. On s'était connu il y a presque exactement un an au Bandiat en Dordogne, l'instant zéro ou j'avais pris la décision ferme de quitter mon taff et de partir en vélo. Maintenant elle est habitante de la Bascule et elle continue sa thèse sur les interrelations entre les communautés autonomes, sur leur capacité à exister à plus grande en échelle, en réseau.

Le Golo fait partie du Groupe du Dimanche, c'est grâce à ça que je l'avais connu quand j'étais à la Bascule. C'est la propriété familiale de Nancy, une infirmière à la retraite, Jack, son mari radiologue (qui me donnera d'ailleurs de bons conseils sur le genou) et leur fils Martin qui est monteur vidéo. Ils ont encore leur grande et belle maison à Pontivy où ils hébergent d'ailleurs d'anciens de la Bascule. Ils sont en train de rénover la grande maison en brique sur leur terrain. Je les ai aidé à faire de la maçonnerie pour remettre des fenêtres dans la maison. Ils ont aussi une grande grange et une longère en brique dont la charpente doit être restaurée, un chalet ou habitent Nancy et Jack et un mobil-home ou habitent Martin et sa copine. Ils ont une dizaine de mètre carré dont pas mal de forêt.

Dimanche 30 aout on est aussi passé chez leurs amis Benoit et Béatrice pour les aider à monter une yourt. C'est un couple de retraités qui ont racheté un manoir à côté de Pontivy dans un terrain forestier très joli. Cette yourt elle va servir aux activités de Béatrice. Elle est chaman et même plus précisément sorcière. "La seul sorcière de France probablement" dit elle. Elle m'a notamment parlé de "spiritualité quantique", une théorie pseudo-scientifique approximativement basé sur la physique quantique dont j'avais déjà rencontré un adepte un fois mais jamais de "sorcière".

 Nancy et Martin sur le chantier de la Yourt

Bon le montage de la yourt a été un peu laborieux. On a été rejoins par les colocs de Pontivy de Nancy et Jack. A presque 10 on a mis toute la journée à monter une yourt en kit.

Je suis très reconnaissant à Nancy et Jack de m'avoir hébergé chez eux, je ne sais pas comment j'aurais fait si ils n'avaient pas été là. J'ai hyper bien mangé chez eux. On avait des légumes frais, plein de fromages artisanaux, des galettes maisons, du yaourt de chèvre fermier, que des trucs de super bonne qualité cuisiné avec soin par Nancy et Béatrice. Un hébergement première classe.

Et puis pendant tout le chantier de la yourt j'ai absolument pas senti mon genou. Le kiné m'avait dit que j'avais intérêt à pas arrêter complètement l'effort et que je pouvais continuer à voyager à vélo. Le soir du chantier de la yourt j'ai contacter Cédric de l'Atelier Z, près de Concarneau, je suis bienvenu pour passer n'importe quel jour en semaine. J'ai 60km soit une étape bien dimensionné selon mon kiné et demain c'est lundi. J'annule mon billet de train, j'annule tous mes rendez-vous médicaux et je préviens la famille qui accueille super bien ce brusque changement de programme. Demain je vais partir du Golo dans la matinée. Je devrais arriver à l'Atelier Z en début d'aprem.

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Publié le 11 septembre 2021

Lundi 30 aout vers 11h je pars du Golo pour aller à l'Atelier Z à Kervic. C'est 60km, Tranquille ! J'ai plus du tout mal au genou depuis hier et aujourd'hui on y va molo. Sauf que non. Je me suis complètement trompé. Je devais pas aller à la ville de Kervic mais dans un cartier qui s'appelle Kervic à Névez à 80km de la ville de Kervic. Oups. Finalement j'aurais fait une (beaucoup) moins raisonnable étape de 140km avec de sacrés dénivelés et j'arrive à Névez à 21h. Même pas mal au genou. En arrivant je partage une bière avec Cédric en train d'écouter du System of a Down à balle dans la cours de sa maison. Après je vais pouvoir rejoindre les trappeuses dans leur forêt et partager le repas avec elles.

L'Atelier Z c'est une asso domiciliée donc à Kervic à Névez sur le terrain du couple de fondateurs Cédric et Blanche, dont l'objet sont les savoirs manuels et qui organise pas mal d'événements autour du bricolage. L'asso a une sensibilité low tech et DIY, elle est d'ailleurs proche du Low Tech Lab installé à Concarneau. Il y a évidement un grand atelier où les membres de l'asso peuvent se servir des outils et un grand hall avec une cuisine commune pour les visiteurs.

Max se construit un établi à l'atelier

Et il y a le village des trappeuses. Les trappeuses c'est Julie, Clémentine, Camille et Maxime. Il y a 1 garçon mais il y a 3 nanas donc on dit "les trappeuses" comme ça c'est inclusif. Donc les trappeuses elles ont construit leur petit village dans les bois du terrain de Cédric et Blanche. C'est des anciennes du Low Tech Lab. Aujourd'hui elles sont bénévoles à l'Atelier Z contre l'usage de cette partie du terrain et elles ont une activité à mi-temps en plus. Elle ont chacune construit leur petit cabanon avec leurs propres méthodes et un cabanon commun avec la cuisine et une mezzanine pour les invités. La douche c'est dans le jardin ! Elles ont utilisé le bois de la forêt et beaucoup de matériaux de récup. Elles ont presque rien dépensé pour réaliser leurs habitations. Mardi matin Julie me fait visiter. Je suis super enthousiasmé. Elles avaient à peu près aucune connaissance ni expérience de la construction quand elles se sont lancées et elles ont fait des trucs qui ont l'air de tenir debout.

 Julie me fait visiter, Clémentine n'a toujours pas finit sa maison, elle est emmerdée par les pénuries de matériaux

Le soir où j'arrive je les retrouve à la cabane commune où il y a la cuisine. Je suis tout à fait le bienvenu mais j'arrive pas forcément au meilleur moment pour filer un coup de patte, chacun (chacune ?) est un peu sur ses trucs et peut pas forcément déléguer. Elles me racontent aussi que demain il y a les gens du Chemin des Possible qui arrivent pour 2 jours. Waaw, c'est quoi ? C'est une grande rando organisée par Hamau Léger. C'est une association qui promeut l'habitation réversible, sans fondation et qui soit accessible type yourt, tiny house etc. Je me souviens être tombé sur cette vidéo pendant que je préparais le voyage à vélo. Trop drôle, à la fin de la vidéo je reconnait Julie que j'avais connu à Solaia dans la Drôme, pas surpris de la voir là dedans.

Mardi Léo est un des premiers à arriver. On a le même âge. C'est un publique plutôt de jeunes trentenaires le Chemin des possibles de toute façon. Il me raconte qu'il a fait une formation agricole d'un an et qu'il fait parti d'un collectif de 10 personnes qui s'apprête à s'installer dans le Puy de Dôme. Il viens juste de finir sa formation, c'est les vacances là pour lui.

Mercredi après-midi je passe au CRADE, le Centre de Recherche sur l'Avenir des déplacements Ecologiques. C'est en fait un atelier de vélo participatif tenu par Hélène, Xavier et Loïc. C'est Clémentine qui m'en avait parlé. Si vous passez avec un vélo à retaper ils vous aident et vous prêtent des outils. J'y suis allé parce que j'avais besoin de changer quelques pièces. Il me semblait que ma cassette était un peu fatiguée se que me confirmeront les bénévoles du CRADE. Je suis allé acheter une cassette et une chaine à Intersport à côté et j'ai pu faire le montage moi-même au CRADE avec leurs outils. C'est des lieux vraiment top les ateliers participatifs. Un vrai hub de partage de connaissances sur le vélo et de rencontres entre cyclistes. Après le changement de pièces je reste un peu pour discuter avec les bénévoles. Xavier me raconte qu'il a fait un voyage à vélo de 3 ans. Il est allé jusqu'au Japon. Bravo.

le CRADE 

Mercredi soir il y une soirée juste à côté chez un couple de maraichers qui sont des amis de Cédric. Il y avait un magicien québécois déguisait en pirate, des pizzas artisanales trop bonnes et un duo de musique trad violon-accordéon. On fait des soirées plutôt géniales aussi en milieu rural ahah. Julie et Max on diffusait leur montage vidéo où ils se foutent de la gueule de Julien Denormandie, ministre de l'agriculture.

Je suis allé à la soirée en vélo avec Lucile et Simon. Ils font le Chemin des Possibles aussi. Lucile elle est graphiste mais elle a un peu arrêté ça pour faire du maraichage et prendre le temps de réfléchir à se qu'elle veut faire de sa vie. Simon il a quitté son taff à peu près au même moment que moi et il voyage aussi mais en sac à dos/stop. Il m'a dit que la ZAD c'était toujours super intéressant. C'est en effet se que me disent à peu près tous ceux qui y sont passé. La ZAD ça a forcément pas mal perdu de son envergure depuis l'abandon du projet d'aéroport, sa raison d'être, mais ça reste semble-t-il un truc à voir.

Comme je suis pas super utile à l'Atelier Z j'ai pas envie de trop m'y attarder. Ce que je compte faire c'est un grand tour de vélo à travers la Bretagne sans chercher spécialement de point de chute mais en allant tranquillement vers la ZAD de NDDL. Jeudi je pars vers 16h. Je vais vers Concarneau et je rejoins la route de vélo qui va jusqu'à Roscoff. Ce que je compte faire c'est aller jusqu'au bout, suivre toute la côte du Finistère, du coup repasser par mon point de départ, Concarneau, longer la côte sud et atteindre la ZAD. C'est un gros tour de vélo de 10-15 jours que j'entreprends. Il doit me faire repasser par Concarneau et l'Atelier Z. En suite je pourrai passer au Manoir de la Grée où je suis bienvenue, au nord de Nantes, puis passer voir un ancien camarade d'école d'ingé à Rennes. Je m'en vais donc en disant "à dans quelques jours les ami-e-s, je cotise les 10€ pour l'asso à mon retour". Sauf qu'encore une fois je vais complètement revoir le programme...

Le premier kilomètre de la voie verte vers Roscoff 
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Publié le 23 septembre 2021

Vers 19h je plante la tente à côté de la voie dans un bout de forêt récemment éclaircie. Evidement en 3h de vélo je n'ai pas fait beaucoup plus que 40 ou 50km.

Vendredi 3 septembre dans la matinée je passe par Gourin et là-bas je passe prendre une carte de vélo à l'office du tourisme. Comme la Côte d'Armor est très bien pourvue en pistes cyclables avec la Vélomaritime mais que par contre les pistes de la côte ouest et sud de la Bretagne sont discontinues et fragmentaires je décide de plutôt suivre la côte d'Armor par la Vélomaritime comme ça c'est à la fois plus directe pour aller vers Rennes et en principe plus agréable.

A Rennes j'ai mes amis Lilian et Catherine qui peuvent m'héberger. Ca fait déjà 3 fois que je leur annonce une date à laquelle je passerai les voir et que je change à chaque fois de programme. Cette fois je leur annonce que j'arrive dimanche, à en juger par les distances sur la carte c'est large, ça fait du ~130km/jour, je vais longer la mer ça va aller ! Je rappelle aussi Elodie du Manoir de la Grée, comme finalement je fais le tour dans l'autre sens je vais arriver début septembre et pas en octobre comme je lui avais dit. C'est bon pour eux ouf.

Vers 20h je plante la tente sur une colline avec un point de vu sur le couché de soleil. Je suis super bien installé mais j'ai à peine dépassé Morlaix. J'ai pas avancé autant que je pensais. Je me demande si je serai vraiment à Rennes Dimanche, ça ne sera jamais que la 4em fois que j'annonce un changement de programme à Lillan et Catherine.

Samedi 4 septembre les performances kilométriques ne s'améliorent pas. En fait la piste longe à peu près la mer mais ça n'est pas plat du tout, on m'avait pourtant prévenue, entre chaque ville il y a des côtes avec des pentes souvent très fortes. Mais quelle joie d'avancer le long des longues plages, en haut des hautes falaises ou au milieu des étiers marécageux où l'eau douce se mélange dans la mer et où la végétation y est singulière. Les bateaux, les oiseaux et les îlots sont beaux quand la lumière du soir sur la mer les éclaire. Et bah alors ? On est pas bien là ?

En plus ce midi on m'a invité à prendre le fromage et le café chez des gens originaires de la Drôme, j'ai atterri sur leur maison de vacances. Ils connaissent bien le milieu dromois de la permaculture, ils m'ont parlé des Amanins où j'imaginais justement faire mon Cours Certifié en Permaculture (CCP). Il y a quelques jours ils sont allé manifester contre l'agro-industrie et les algues vertes. Depuis leur terrasse on a une vue dégagée sur la mer et on les voit bien les algues vertes, on voit personne sur la plage par contre bizarrement...

Ce soir j'ai dépassé Lannion et je suis encore à 30km de Paimpol. J'ai probablement avancé de moins de 100km aujourd'hui. C'est sûr maintenant, je ne serai pas à Rennes demain. J'ai planté la tante dans la cours en friche d'une maison abandonnée, isolée au milieu de la forêt dont les portes et les fenêtres sont condamnées, encore un super campement, j'arrive toujours à trouver des endroits supers pour la nuit.

Dimanche 5 aujourd'hui au programme c'est du brouillard, du brouillard et du brouillard. Je me réveille avec une tente mouillée. Je n'aurais jamais vraiment l'occasion de la faire sécher. J'ai pas du tout profité des paysages du coup mais j'ai pas mal avancé cette fois, environs 130km malgré de grosses dénivelés, j'ai largement dépassé Saint Brieuc.

Vers 19h je vois Sylvie en train de nettoyer sa voiture devant chez son père. Je lui raconte que ma tente est mouillée, que je n'ai pas pris de douche depuis une semaine et que je n'ai plus rien d'autre à manger q'une boite de sardines et deux barres de céréales. Je lui dit aussi que je ferai la cuisine et la vaisselle et que je lui chanterai une chanson si elle veut. Du coup j'ai été invité chez son père Roger pour la nuit et avec Sylvie, Soleine et Mathieu. Roger c'est un prof d'informatique à la retraite qui a fait de la prison après son service en Algérie, une sombre histoire d'arrosage de plantes avec du désherbant. J'ai passé une soirée bien conviviale avec eux. Soleine m'a raconté qu'elle avait elle aussi visité des écolieux, qu'elle avait déjà rencontré des voyageurs à vélo comme ça. D'ailleurs les éco-lieux ça les intéressent tous ici. Ils ont commencé leur petit potager cette année, ils font leur petit composte, ils mangent un peu de viande parfois mais pas trop. Ce soir on a mangé des burgurgs de champis avec une salade de tomates, j'ai été bien reçu. C'est marrant les profils sur lesquels je tombe apriori par hasard parfois.

Lundi 6 septembre j'en finis avec la vélomaritime, je vais directement à Rennes, c'est 130km. Je passe par Dinan puis par le cannal de la Rance et Villaine, c'est super joli mais le soleil cogne dur. Le soir j'arrive assez rouge et un peu éclaté chez Catherine et Lilian.

Lilian c'est un camarade de promo que j'ai connu en école d'ingé à Rennes entre 2014 et 2016 et Catherine c'était et c'est toujours une prof d'info là-bas. Ils se sont connu et sont ensemble depuis cette époque. Ca m'a fait bien plaisir de les revoir, je n'ai gardé contact avec à peu près personne de Supélec. J'ai repris contact avec Lilian parce que c'était un membre de la promo que j'appréciais et je me doutais qu'il était toujours vers Rennes. Ils m'ont logé dans la chambre où Lilian a installé sa ferme de GPU qui lui sert à miner du Bitcoin. Il m'a raconté qu'il a eu la chance de faire d'excellents placements sur les monnaies virtuelles ce qui les a aidé à compenser la faillite de leur première boite. Lilian m'a parlé de son intérêt pour l'anarcho-capitalisme et surtout de son projet d'une autre entreprise, LIFE!, avec des QR codes sur des pierres tombales et des images en réalité augmentée de proches disparus. Depuis le décès de son grand père il a l'idée de complètement disrupter le secteur funéraire.

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Publié le 12 octobre 2021

du mardi 7 septembre au vendredi 17 septembre 2021

Mardi 7 septembre le soleil cogne encore dur. Je n'ai que 25km pour arriver au Manoir de la Grée donc je pars vers 18h pour laisser passer la chaleur. Au crépuscule j'arrive dans la court du manoir où je rencontre Dominique et Edouard en train de faire le trie dans leurs fruits et légumes. Ils viennent de récupérer des invendus du marché et il faut dissocier se qu'on mange et se qu'on balance au composte.

Le Manoir de la Grée c'est un collectif, c'est à dire que plusieurs personnes s'organisent pour habiter le lieu à plusieurs en se donnant des règles de gouvernance. Il est détenu par une SCI mais tout le monde n'a pas forcement de part dedans, Dominique (alias Dom) n'en a pas par exemple. Chaque membre du collectif jouit d'un espace privé et paye un loyer relatif à cet espace. Il y a 30 Ha en tout avec des constructions en pierre vieilles de plusieurs siècles: un espace commun qui sert de cuisine, plusieurs habitations, un grand atelier et évidement le fameux Manoir.

Dom c'est une infirmière à la retraite qui joue à Mincraft (elle a carrément appelé son chien "Criper") et qui vit dans une yourt. Elle l'a posé sur la Grée il y a 3 ans en rejoignant le collectif. C'est une dame très engagée dans la lute pour la justice sociale et l'écologie radicale, elle a d'ailleurs voulu resté en Bretagne (car la Loire Atlantique c'est bien sûr la Bretagne) pour rester proches de ses réseaux militants. Eduard il a 30 ans, il est vendeur à la Biocoop, il est électricien et il vit lui aussi dans une yourt avec Elodie, la nana avec qui j'étais en contact pour arriver ici, et leur enfant Manek. Elodie elle est chanteuse. J'ai pu prendre une douche chez eux en arrivant. Waw on peut être vraiment super confort dans une yourt je trouve. C'est grand, c'est lumineux, c'est bien isolé, c'est démontable et leur modèle c'est 25 000 €, de quoi donner des idées je trouve.

Ça fait 15 ans que le collectif s'est fondé et qu'ils font des rénovations sur les bâtiments. Sauf qu'en janvier dernier le manoir a brulé. Après tous ce travail il est retourné à l'état de ruine. La cause de l'incendie serait un poil à bois laissé allumé par un visiteur une nuit dans une pièce inoccupée. Les ruines doivent encore être expertisées. Aucune assurance ne prend en charge le bâti, le collectif espère faire jouer la responsabilité civique du visiteur. J'ose à peine imaginer la frustration et la tristesse que ça leur a fait, moi qui suis déjà dégouté quand mon ordi plante et que je perd 3h de travail non sauvegardé. Là c'est 15 ans de travail collectif, de bénévoles et d'artisans, des milliers d'euros investis. Je pense que c'est un profond traumatisme pour eux, surtout pour les membres les plus anciens.

les ruines du manoir 

La fonction du manoir c'était je crois surtout de servir d'espace commun, faire la cuisine, servir de dortoir pour les visiteur, faire la fête etc. Aucun membre du collectif ni habitait.

La Grée est en autonomie énergétique c'est à dire qu'il ne sont pas relié aux réseaux électriques. Ils sont presque entièrement sur du panneaux photovoltaïques. Christophe a aussi réalisé une roue à Augets et ils ont des groupes électrogènes qui servent d'appoint pour l'hivers. Ils ont pas mal de compétences en électricité, il ont réalisé eux même toute leur installation électrique.

Depuis que je suis arrivé à la Grée on me parle du concert de samedi prochain. Ils ont beaucoup d'espace pour organiser des événements d'une grosse cinquantaine de personnes sans aucun problème et, croyez moi, ils savent le faire. Le collectif a des relations dans le milieu culturel et artistique local. Trois groupes et une fanfare sont prévus et David, jeune crêpier reconverti, tiendra son stand de galettes. La scène où joueront les artistes a été conçu avec une structure auto-portée (ou "réciproque" doit-on dire) par Vincent et il a encadré sa réalisation avec des bénévoles cet été. Le bois d'if qui a servis dans sa construction a été prélevé directement sur leur terrain. Jeudi matin, deux jours avant le concert donc, on passe la matinée à faire les installations dans la court, l'installation électrique, les lumière, avec Jean (alias Mata) et Vincent on a tendu une bâche sous la structure du chapiteau.

Vincent c'est le membre du collectif avec lequel j'ai passé le plus temps jusque là, je l'ai pas mal aidé sur ses projets persos. Et Jean c'est un des membres fondateurs du collectif, il est là depuis les tous débuts. Il doit avoir ~45 ans. Il est paysant boulanger et contrebassiste, d'ailleurs samedi il va interpréter du Brassens avec son guitariste. C'est aussi un type qui donne des ordres comme un petit chef, parle fort et qui aime réfléchir à voix haute et rire à ses propres blagues. J'ai halluciné quand j'ai vu ce mec. Il m'a sorti un "Ah toi tu viens chez moi comme ça gnagnagna" pendant qu'on mettait la bâche à peine 30 min après qu'on se soit rencontré. J'étais en train de l'aider sur son chantier et il pique une crise comme un enfant parce que je me servais pas bien de la visseuse. Je crois que jamais un adulte ne s'est comporté envers moi d'une façon aussi activement désagréable, à la limite du manque de respect, et lui l'a fait pour un truc totalement dérisoire.

Samedi 11 on a la chance d'avoir d'excellentes conditions météo. Une fois la nuit tombée on voit parfaitement les étoiles, la voie lactée et grâce à Vincent j'ai appris la veille qu'on pouvait même voire Jupiter en ce moment. On peut pas la rater, elle est hyper brillante, bien plus que n'importe quelle étoile du ciel nocturne. C'tait nikel, j'avais largement de quoi engager une conversation sur un ton passionné et mystérieux avec les nanas de la soirées sur le thème des étoiles et enchainer sur l'astrophysique de l'expansion de l'univers, la matière noire et quelques interrogations ouvertes sur la vie extraterrestre. Avec un peu de pratique je pense qu'il y a moyen de parvenir à susciter un vertige métaphysique assez intense chez son auditoire.

 la scène: (à gauche) le groupe de flamenco; (à droite) (en bas) Mata et (en haut) Vincent

Le concert et les étoiles c'étaient très cool sauf que ce soir là ma relation avec certains membres du collectifs, et notamment avec Jean, c'était pas cool du tout. Déjà presque personne ne savait que je débarquais cette semaine là et donc, à fortiori, mon accueil n'a fait l'objet d'aucune décision collective de leur côté. Ensuite moi depuis le début, à part une matinée pour préparer la soirée, j'ai quasiment pas travaillé dans les espaces collectifs de la Grée mais avec Vincent sur ses chantiers persos, si bien que certains habitants me percevaient certainement comme un parasite ou un profiteur. Pourtant mon statut de bénévole il avait été validé trois jours plus tôt, personne est venu me voir pour clarifier cette situation. Donc ça c'est fait pendant la soirée avec Mata et Susanne. Ils m'ont dit en substance "nous on t'aime pas, on a pas envie de te donner un statut de bénévole parce qu'on veut pas t'intégrer à notre équipe". Waw, plus tard dans la soirée ils m'ont pris à parti pendant que je regardais le concert, m'ont isolé, m'ont soupçonné de leur avoir volé de la bière et ont exigé des explications sur un ton accusateur et indigné. Ils m'ont carrément menacé me virer de la Grée. Ils ont quand même des méthodes de communications assez spéciales ici.

La Grée c'est un collectif de gens qui vivent objectivement au paradis. Pour moi ça a été hyper frappant de constater à quel point certains semblent aller plutôt pas bien. Je me souviens le soir ou je suis arrivé Dom m'a mis en garde sur la vie en collectif. Ça génère aussi de la souffrance, il y a des personnalités qui s'expriment, des jeux de pouvoir, des jeux d'égo. Les gens qui habitent là sont dans un cadre hyper agréable pour un loyer hyper avantageux. Certains savent pas forcement où ils iraient s'ils devaient partir donc si il y a des choses qui posent problème avec le collectif et bah ils ferment leur gueule. Ils ont fait de la communication non-violente, il parait que ça les a déjà bien aidé. Evidement l'incendie a certainement eu un effet corrosif sur la santé du groupe. J'ai discuté avec Mathieu de ça, il les connait depuis des années, il a été bénévole sur la rénovation du manoir avant l'incendie, il me raconte que ça allait déjà pas super même à cette époque.

"L'enfer c'est le autres"

J P Sartres

Après le concert mon statut a largement été clarifié. Je suis pas un bénévole pour la Grée mais en woofing chez Vincent, maintenant tout passe par lui. Sil n'avait pas été là je me serais barré le dimanche matin.

Vincent il vient de Lille, il a 36 ans. Son métier avant c'était de faire de l'animation 3D pour de la vidéo. Vers 28 ans il habitait en colloc vers Lille dans une maison avec un jardin. Il louait ça à un prix avantageux auprès de quelqu'un de sa famille. Il me raconte qu'un jour il se demande "ok, qu'est-ce qui me coute le plus ? La bouffe et la bière". Il s'est donc documenté pour mettre son jardin en production et pour brasser sa bière. C'est comme ça qu'il est tombé sur la permaculture et que sa vie, me dit-il, "a changé". pendant une saison il a mis son jardin en production avec ses petites tomates, ses petits concombres, ses herbes aromatiques itou itou. Il a aussi monté une association de brassage de bière qui mettait du matériel de brassage à disposition des membres et se fiançait sur la vente des futs. Après il est parti en vélo faire un tour de France des éco-lieux jusque dans le Puy de Dôme. Il a fait deux CCP (Cours Certifié en Permaculture). Il habite maintenant à la Grée depuis 3 ans. Ici il a un petit hectare perso qui lui sert "d'espace d'expérimentation". Il a été le brasseur officiel de la Grée pendant un moment mais il fait plus de bière maintenant, il me dit que c'est pas se qu'y le fait le plus kiffer.

Plus récemment il a aussi co-fondé une asso, Toucher Terre, qui installe des chauffages et cuisinières à masse (ou roket stove) en terre. Un chauffage à masse c'est un poil à inertie, c'est à dire que l'énergie produite par le feu de bois est partiellement stockée dans des matériaux comme le sable, la pierre et l'occurence la terre. C'est un mode de chauffage à la fois éco-construit et hyper optimal énergétiquement. Vincent a déjà un chauffage à masse dans son salon et il a l'intention de construire une cuisinière dans le jardin pour l'été.

chez Vincent

Il est clairement super bien installé ici. Je l'ai aidé surtout au jardin à entretenir ses planches de culture, à construire une arche en bois pour faire monter des plantes grimpantes et un abris à outils, à faire du terrassement aussi. Il bosse vraiment du matin au soir Vincent, sans précipitation, sans stresse et sans s'arrêter. J'ai presque toujours fait la cuisine. On a fait des récup de fruits et légumes de l'espace ! On récupérait des poubelles d'invendus dans lesquelles on retrouve du raisin, des grenades, des salades, de la patate douce, des carottes tous ça gratos, il faut juste faire le trie et le nettoyages. C'est presque choquant les quantité de nourriture qu'on peut récupérer dans des poubelles en France, y compris dans celles de sympathiques boutiques bio.

"La vrai abondance c'est pas d'en avoir beaucoup, c'est de savoir qu'il y en aura toujours"

Ça taff ici ! On a construit un abris à outil au carré en une journée

Vincent m'a aussi raconté son histoire avec le poker, elle m'avait bien surprise. Quand il était étudiant il jouait pas mal au poker en ligne avec des potes. Ils partageaient un compte à trois. Un jour ils gagnent une place pour participer à un tournois professionnel. Or le compte est au nom de Vincent, c'est lui qui doit participer ou la place est simplement perdue, on ne peut même pas la revendre. Ce qui est décidé c'est donc que Vincent participe à la compétition et que la récompense éventuelle soit partagée en 50-25-25, Vincent touche la moitié de la récompense et les deux autres se partage le reste, fair enough. Il va arriver 13e sur plus d'une centaine de participants et remporter 80 000 € (soit donc 40 000 € pour lui). Un gros coup de pouce pour lancer ses projets. Il me dit que, comme on peut se le représenter, le milieu du poker est plutôt malsain. Il a pas du tout voulu continuer la-dedans.

En ce début septembre lui comme moi sommes dans une période flottante d'indetermination, d'incertitude quant à ce à quoi nous voulons consacrer notre temps et nos efforts dans les jours, les semaines et les mois qui viennent. Vincent hésite, il voudrais repartir voyager, peut-être en Amérique du sud, peut-être en bateau-stop. Il veut aussi faire avancer Toucher Terre, retrouver des contrats. Il pense aussi à finaliser son statut de permaculteur en réalisant un véritable projet d'installation avec son propre design. Il imagine une genre de grande coloc dans un jardin permacole. A ce moment il ne sait pas encore très bien, il pense à faire un jeûne de quelques jours pour avoir les idées plus claires.

Et moi je suis aussi dans un brouillard assez épais. Lundi 13 septembre le programme c'est encore de pousser jusqu'à la ZAD, faire de nouvelles rencontres, visiter encore d'autres trucs, apporter mon aide ailleurs. A la Fontaine Pareuse, en juillet, j'avais aussi discuté avec Nico de passer l'hiver là-bas, apriori c'était ok, il fallait juste que je le rappelle. On s'était dit qu'on ferait de la musique à fond ensemble. Mais j'ai l'impression qu'au point ou j'en suis ça devient moins fécond de continuer comme ça, à aller chez des gens pour leur filer des coups de main. Je fais des rencontres et des découvertes mais je suis pas en train de construire quelque chose comme ça. Je veux finir d'écrire mon article sur les poissons pour LGA, j'ai un délais pour fin octobre, je veux bosser la musique sérieusement, me prendre un prof, me monter ou rejoindre un groupe. Je peux pas faire ça en voyageant. Et puis j'en ai mare de porter tous le temps des fringues de sports en matière synthétique, de pas maitriser mon emploi du temps, de pas avoir mes affaires. Il y a une partie de ma famille qui est pas contente de ce projet, qui dit que je devrais retrouver un taf et arrêter d'être un assisté. Elle a sûrement en partie raison.

Voilà ce que je pense faire. Je vais bosser pendant l'hivers comme ingénieur en data, c'est à dire ce que je faisais avant de me barrer, pour refaire un peu de sous et repartir voyager au printemps. Je vais rentrer chez la famille en IDF, me mettre dispo sur des plateformes de freelance pour une mission de dev, me prendre un prof de musique, finir d'écrire l'article pour LGA et revoir des potes sur Paris. Ouais, je pense que c'est la bonne chose à faire maintenant. Dans les milieux alternatifs on dit souvent qu'il faut garder "un pied dans le système". Et bah voila, je garde un pied dedans. Je maintiens mes compétences en dev et je fais un peu de tune en bossant comme mercenaire pour des boites qui fondamentalement ne m'intéressent pas. Mais je déteste pas du tout mon boulot, mon problème c'est sa finalité. A quoi ça sert ? Et qui ça sert ?

Vendredi 17 septembre je pars pour la dernière étapes d'Encyclopédaliste, j'arrive chez la famille 3 jours plus tard, le jour de l'anniversaire de mon père, le 20 septembre. C'est une moyenne de 140km/jour. J'ai été essentiellement sur de la piste cyclable, notamment la très sympathique voie verte du Perche que j'avais empruntée à l'allé, jusqu'à l'arrivé dans l'enfer urbain d'IDF où je me suis retrouvé plusieurs fois à longer des national hyper fréquentées. Je suis bien accueilli par ma grand mère, mes tantes, mon oncle, mon père et mon cousin Benjamin. On est tous contents de nous revoir.

En regardant en arrière je suis très impressionné par tous ce que j'ai vécu en 7 mois. J'ai beaucoup de gratitude pour ça, j'ai été surpris de trouver autant. Ce que j'ai déjà tiré de ce voyage est inestimable. Il a fait basculer ma vie vers quelques chose d'encore complètement indéterminé. Je l'aime cette indétermination, elle est le signe d'un monde encore à explorer. L'horizon c'est beaucoup élargi. Il y aura pas de retour au point de départ possible.